Les dirigeants politiques grecs progressaient dimanche dans leurs fièvreuses tractations pour former un gouvernement de coalition, succédant à l'équipe sortante de Georges Papandréou, chargé de conjurer sans dérapage le spectre d'une faillite et d'une sortie de l'euro.
A l'occasion d'une rencontre avec le chef de l'Etat, le leader de l'opposition de droite, Antonis Samaras, a relancé les espoirs d'une issue, qu'il avait douchés la veille, en soulignant que le pays devait "lancer un message de stabilité, de confiance et de normalité" tant vers ses partenaires et créanciers qu'en interne.
Il a laissé entendre qu'un accord sur un gouvernement de coalition ne dépendait plus que de la démission formelle de M. Papandréou: "je suis décidé à apporter mon aide, s'il démissionne, tout suivra son cours", a lancé M. Samaras à sa sortie du bureau présidentiel.
M. Papandréou s'affirme prêt depuis des jours à passer la main mais garde pour le moment les rênes, officiellement pour éviter une chaise vide grecque dans la zone euro. Alors que la fièvre montait dans le pays sur un éventuel déblocage du grand marchandage en cours, il a finalement avancé à 14H00 GMT un conseil des ministres extraordinaire, qui devait au départ n'être qu'une simple réunion de cabinet restreint et informel.
Rendant compte de discussions officieuses, le ministre d'Etat et porte-parole du gouvernement, Ilias Mosialos, a lui appelé à un "accord d'ici ce soir pour la formation d'un gouvernement de coopération nationale".
S'exprimant sur la télévision Net, il a aussi jugé "utile" une entente rapide sur "le nom du Premier ministre", alors que le ministre des Finances Evangélos Vénizélos, ex-rival malheureux de M. Papandréou, et le conseiller du Premier ministre et ancien vice-président de la Banque centrale européenne (2002-2010), Lucas Papademos figurent parmi les favoris.
"Le pays ne peut pas perdre plus de temps", a insisté M. Mosialos, estimant que dans le cas d'un accord d'ici lundi, le nouveau gouvernement pourrait être investi et recevoir la confiance d'ici la fin de la semaine.
La calendrier apparait d'autant plus serré que la Grèce entend négocier lundi lors d'un conseil de l'Eurogoupe à Bruxelles le versement d'un soutien de 80 milliards d'ici fin février, dans le cadre de l'accord de désendettement conclu par la zone euro fin octobre à Bruxelles. Mais elle doit aussi, selon M. Mosialos, ratifier ce plan au parlement d'ici fin 2011, qui inclut de nouveaux douloureux sacrifices pour les Grecs.
M. Samaras a réitéré samedi son refus de soutenir en l'état et sous forme "d'un chèque en blanc" de telles mesures d'austérité, alors qu'il dénonce depuis deux ans le "dosage" de la politique dictée par les créanciers du pays, jugeant qu'en imposant la rigueur à tout prix, elle risque de tuer l'économie.
Mais au plus fort du psychodrame politique vécu par la Grèce depuis une semaine après l'annonce par M. Papandréou d'un projet, depuis retiré, de référendum, il s'était pour la première fois engagé à soutenir le vote du plan de Bruxelles.
Une avancée qui pourrait être déterminante alors que les Grecs continuent, selon trois sondages parus dimanche, de plébisciter l'euro, en dépit de la grogne contre l'austérité qui a semé la fronde contre M. Papandréou dans la majorité socialiste, fait gronder la rue et grippe à coup de grèves à répétition la machine étatique.
"L'absence d'un consensus risquerait d'inquiéter nos partenaires européens sur notre volonté de rester dans l'euro", avait mis en garde samedi M. Papandréou.
Ces baromètres dégageaient aussi une majorité de Grecs en faveur d'un gouvernement d'alliance face à l'option d'élections immédiates, même si aucun chef potentiel ne se dégageait, au vu de la défiance de plus de 40% des Grecs envers l'actuelle classe politique.
L'appel à une issue rapide, même si elle ne devait déboucher, en cas d'impasse, que sur une équipe socialiste remaniée et dotée d'un nouveau chef, était quoiqu'il en soit relayé par la presse dimanche.
"Le pays a besoin d'avoir lundi un nouveau gouvernement, qui évitera la faillite et le retour à la drachme", écrivait dans son éditorial le libéral Kathimérini, sous un titre dénonçant des "Marchandages à bord du Titanic".
Pour le diriger, Kathimérini avançait à nouveau, outre le nom de M. Papademos, celui de Stavros Dimas, ex-commissaire européen à l'environnement, qui flanquait samedi M. Samaras lors de l'intervention télévisée de ce dernier.
Leur concurrent principal, à en croire les journaux pro-socialistes, qui avaient manifestement fait leur choix, était M. Vénizélos, qui figurait sur la plupart des unes sur des clichés où on le voyait au côté de M. Papandréou.