Le président français François Hollande a affiché mardi sa volonté d'un "compromis raisonnable" sur le budget européen, à deux jours d'un sommet menacé d'un nouvel échec tant les positions des Etats restent éloignées.
"Ma position s'énonce simplement: faire des économies oui, affaiblir l'économie, non", a asséné M. Hollande devant le Parlement européen à Strasbourg, avant le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement qui s'ouvre jeudi pour deux jours à Bruxelles.
"Un compromis est possible mais il doit être raisonnable et donc il va falloir raisonner ceux qui veulent amputer le budget européen au-delà de ce qui peut être accepté", a prévenu le chef de l'Etat français.
Après un premier sommet en novembre qui s'était soldé par un échec, les Européens continuent de se déchirer entre partisans d'une politique privilégiant croissance et solidarité, comme la France, et partisans de coupes franches dans les dépenses, comme la Grande-Bretagne, l'Allemagne, les pays nordiques et les Pays-Bas.
Quelques jours après son discours sur l'Europe à Londres, dans lequel il a exigé des réformes de l'UE et annoncé la tenue d'un référendum après 2015, le Premier ministre britannique David Cameron figurera de nouveau au nombre des dirigeants qui exigent des coupes supplémentaires dans le budget 2014-2020.
A ceux qui estiment qu'un compromis sera "difficile, voire impossible" en raison de la position intransigeante de M. Cameron, M. Hollande a lancé: "Pourquoi un pays pourrait-il décider à la place des 26 autres"?
Tout en assurant qu'il venait à Bruxelles "chercher un accord", M. Hollande a rejeté les coupes budgétaires qui finissent par mettre en cause la croissance".
Il a aussi reconnu que la Politique agricole commune (PAC), dont la France est le principal bénéficiaire, allait "voir ses crédits diminuer par rapport aux propositions de la Commission européenne". "Cela engendrera nécessairement des restructurations difficiles dans un secteur essentiel pour nos territoires", a-t-il souligné.
En cas de nouvel échec, les Européens devraient se contenter d'un budget annualisé et plusieurs pays, dont l'Allemagne, se verraient privés d'une partie de leur rabais. Londres en revanche pourrait garder le sien, obtenu en 1984 et inscrit dans les traités.
Alors que la France et l'Allemagne ne sont pas parvenus à une position commune, le chef de l'Etat français et la chancelière allemande Angela Merkel se rencontrent mercredi soir à Paris pour tenter de rapprocher leurs vues.
La discussion sur le budget débutera jeudi sur la dernière proposition de compromis mise sur la table en novembre par le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy: un budget de 973 milliards d'euros, soit 1,01% du PIB européen, ce qui représente déjà une réduction de 77,4 milliards par rapport aux demandes de la Commission européenne.
Plus généralement, le président français a estimé mardi que "l'intérêt national est en train de prendre le pas sur l'intérêt européen". "Ce qui nous menace n'est plus la défiance des marchés, mais c'est celle des peuples", a-t-il lancé. "L'Europe ne peut pas être une addition de nations, chacune venant chercher dans l'Union ce qui lui serait utile pour elle et elle seule".
Il a aussi estimé que l'euro "ne peut fluctuer selon les humeurs du marché", au risque de mettre en danger les efforts de compétitivité des pays de la zone euro, et qu'il faut "réfléchir à la place de notre monnaie dans le monde".
L'Europe "laisse sa monnaie, l'euro, vulnérable à des évolutions irrationnelles dans un sens ou dans un autre", a souligné M. Hollande dans son discours. "Une zone monétaire doit avoir une politique de change sinon elle se voit imposer une parité qui ne correspond pas à l'état réel de son économie", a-t-il dit.
Trois jours après son déplacement au Mali, où il a été accueilli en "libérateur", le chef de l'Etat français a été salué pour son engagement dans le pays. Présent dans l'hémicycle, le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a "rendu hommage au courage et à la détermination de la France".
Paris est engagée militairement depuis trois semaines dans le pays, mais avec un soutien européen jugé timide par de nombreux observateurs.
"La France est intervenue au Mali au nom de la communauté internationale, au nom de l'Europe, non pas pour défendre un intérêt", a déclaré M. Hollande, en soulignant que la sécurité, la stabilité et le développement du Mali n'était plus de la seule responsabilité de la France mais "de toute l'Europe".