Après six mois de paralysie politique, le nouveau gouvernement allemand va prendre ses fonctions mercredi. Voici les priorités du quatrième mandat de la chancelière Angela Merkel. La réforme de l'Union européenne y joue un rôle central.
- Union européenne -
Le contrat de coalition entre conservateurs et sociaux-démocrates s'ouvre sur un chapitre intitulé "un nouvel élan pour l'Europe", au moment où l'UE est minée par les crises, sa bureaucratie et le retour des nationalismes.
Pour le vice-chancelier et ministre des Finances désigné Olaf Scholz, il en va de la survie de l'Union: "Nous avons pour mission que le projet (européen) avance de telle manière que l'avenir politique de la démocratie et de l'économie de marché soit garanti. Dans un monde toujours plus complexe, il est essentiel que les Européens restent ensemble".
Le nouveau gouvernement a prévu une hausse de la contribution allemande au budget de l'UE et de "renforcer durablement" avec la France la zone euro pour la rendre plus résistante aux crises. Berlin est aussi favorable à la création d'un Fonds monétaire européen.
Par contre, Mme Merkel n'a jusqu'ici apporté qu'un soutien prudent à l'une des idées phares de M. Macron: un budget d'investissement de la zone euro pour faciliter sa "stabilisation" et soutenir les "réformes structurelles".
L'Allemagne ne dit rien non plus de l'idée française d'un ministre des Finances de l'UE alors que Berlin craint par dessus tout de devoir payer les dettes des autres.
La chancelière a promis plus de "clarté" après un déplacement à Paris pour élaborer des propositions communes en vue du Conseil européen des 22-23 mars.
- Migration -
En 2015, Angela Merkel ouvrait les portes de l'Allemagne à des centaines de milliers de candidats à l'asile. Une décision qui l'a fragilisée et qui a conduit au succès historique de l'extrême droite aux élections législatives de septembre 2017.
Dans l'accord de coalition, la frange la plus à droite du camp conservateur de la chancelière a obtenu une limite au nombre de demandeurs d'asile autorisés annuellement dans le pays (entre 180.000 et 220.000). Et les sociaux-démocrates ont dû se contenter d'une reprise très limitée du regroupement familial.
Le futur ministre de l'Intérieur, le conservateur bavarois Horst Seehofer, a promis "un +Masterplan+ pour accélérer l'examen des demande d'asile et multiplier les expulsions, car leur nombre doit considérablement augmenter".
Au niveau européen, Mme Merkel espère toujours arracher des quotas de répartition des réfugiés à travers l'UE, un chiffon rouge pour nombre de pays d'Europe centrale et orientale.
La chancelière veut aussi s'attaquer "aux causes de la migration" clandestine via la sécurisation des frontières de l'espace Schengen, des accords pour des procédures d'expulsion simplifiées et une aide au développement accrue aux pays dits d'origine.
- Économie: répondre aux peurs -
"Nous vivons une période de changement du monde qui va probablement autant transformer les choses que le passage de la société agraire à la société industrielle": Mme Merkel s'est donné pour mission au cours de son quatrième mandat de préparer l'avenir, elle qui a toujours été accusée de se satisfaire de la prospérité héritée des réformes de ses prédécesseurs.
Malgré le "boom économique", souligne Olaf Scholz, il y a "la peur de nombreux citoyens pour l'avenir de leur emploi". En cause, l'essor du numérique, de la robotisation et de la mondialisation.
Ces craintes --qui sont aussi au cœur des succès du Brexit, de Donald Trump et de partis d'extrême droite comme l'Alternative pour l'Allemagne-- doivent être combattues, selon la feuille de route du prochain gouvernement, par un savant mélange d'investissements dans le digital et l'infrastructure, de baisses d'impôts, de stabilisation du niveau des retraites et d'accès à l'éducation.
Pour la chancelière, l'objectif de ce quatrième mandat sera "d'amener la prospérité à tous", alors que les inégalités se sont creusées malgré la croissance.
Au total, grâce aux surplus budgétaires passés et à venir, ce sont au moins 46 milliards d'euros de dépenses supplémentaires qui sont prévues jusqu'à la fin de la législature en 2021.