Le patronat a accueilli avec soulagement l'élection d'Emmanuel Macron mais l'attend sur ses capacités de réforme, en particulier du droit du travail, un sujet qui constitue au contraire une ligne rouge pour nombre de syndicats.
Dans les milieux économiques et syndicaux, la victoire de l'ex-ministre de l'Economie est un heureux épilogue après plusieurs semaines d'inquiétude face à la progression de Marine Le Pen.
Pour autant, des sections syndicales ont donné dès lundi le ton de l'opposition à laquelle le nouveau président risque de faire face, en rassemblant des milliers de manifestants à Paris.
"C'est un soulagement par rapport au risque de l'extrême droite ou de l'extrême gauche", a confié à l'AFP Pierre Gattaz, président du Medef, qui avait fustigé plusieurs mesures du programme de la candidate du FN, comme la sortie de l'euro ou la hausse des dépenses publiques.
"C'est une bonne nouvelle pour le pays, on a quelqu'un qui comprend les mutations du monde, un programme pro-européen, pro-économique, pro-entreprises", a-t-il souligné.
Même tonalité du côté de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), qui avait pourtant tenu à conserver sa neutralité au cours de la campagne.
Avant l'élection, "nous avions mis en perspective les programmes économiques des uns et des autres, et ce n'était pas très compliqué de s'apercevoir que du côté de Marine Le Pen, il y avait une telle incohérence que ce n'était pas souhaitable pour l'avenir économique du pays", a déclaré à l'AFP François Asselin, président de la deuxième organisation patronale française.
Mais les patrons restent prudents sur l'avenir, au-delà de l'étape, cruciale, des législatives.
Pour M. Asselin, le futur président va devoir s'atteler à des "travaux d'Hercule" et ne pourra "s'affranchir de réformes vraiment profondes et structurelles" pour répondre aux problèmes de la "dette abyssale" française, du "déséquilibre entre le secteur marchand et la sphère publique", du déficit extérieur colossal", de la "désindustrialisation du pays" et enfin du "chômage massif".
- Mises en garde -
Emmanuel Macron "a dit pendant la campagne qu'il était déterminé", a rappelé pour sa part Alain Griset, patron de l'Union des entreprises de proximité (U2P), réunissant artisans, commerçants et professions libérales.
"On va très rapidement voir avec lui et son gouvernement de quelle manière cette détermination va se mesurer en termes de décisions concrètes".
En particulier, les milieux patronaux l'attendent au tournant sur sa volonté de réformer rapidement le droit du travail, source de fortes oppositions dans l'Hexagone. D'autant plus que son choix de recourir aux ordonnances n'est pas du goût des syndicats.
Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force Ouvrière (FO), a ainsi prévenu qu'"il y aura problème" s'il persistait à vouloir procéder de la sorte.
Les réformes envisagées "ne seront acceptables et acceptées que si, et seulement si, le nouvel exécutif respecte les fondements du dialogue social", a averti la CFTC.
Des sections CGT, SUD ou Unef et des associations, qui n'ont jamais accepté la fin de la bataille contre la loi travail, ont donné dès lundi le coup des batailles qu'ils entendent mener.
Réunies au sein du collectif "Front social", ces organisations ont fait défiler des milliers de personnes entre Place de la République et Place de la Bastille aux cris notamment de "bienvenu Macron, on aura ta peau".
Les centrales syndicales au niveau national ne se sont pas associées à cette initiative.
"Chaque chose en son temps", a souligné M. Mailly. "Pour le moment, il est à peine élu, on va regarder ce que ça donne", notamment "est-ce qu'il veut faire une loi El Khomri puissance XXL?".
Pour M. Gattaz, "il ne faut pas trop tarder" à mettre en oeuvre ces réformes.
"S'il y a la confiance des acteurs économiques d'un côté, et de l'autre celle des acteurs internationaux, la France peut retrouver rapidement les chemins de la croissance et de l'emploi", a-t-il estimé.