Pour lutter contre les marchands de sommeil qui sévissent dans les zones pavillonnaires d'Ile-de-France, un rapport préconise de faciliter leur expropriation, de confisquer leurs biens en cas de condamnation et de financer la rénovation de l'habitat vétuste.
Rendu public mardi, ce texte est signé par le président de l'Etablissement public foncier d'Ile-de-France (EPFIF) Geoffroy Didier, également vice-président de la région Ile-de-France, en charge du logement et de la politique de la ville.
Lutter contre l'habitat indigne - qui désigne les "situations d'habitat constituant un déni au droit au logement et portant atteinte à la dignité humaine" - est un "enjeu grandissant" en Ile-de-France, constate le rapport.
En effet dans la région, 180.000 logements privés soit "près de 5% des résidences principales privées sont "potentiellement indignes": pavillons divisés, immeubles et locaux insalubres (caves, sous-sols, combles), immeubles en ruine, hôtels meublés dangereux ou habitats précaires, selon l'Agence nationale de l'habitat (Anah).
Or "la tension du marché et la saturation du parc social ne laissent pas d'autre choix à des populations de plus en plus en difficulté, exclues du marché classique du logement", que d'occuper un logement indigne, ce dont "tirent profit propriétaires indélicats ou véritables marchands de sommeil".
Ainsi ces divisions pavillonnaires "s'étendent progressivement, par effet de tâche d'huile ou "de grappe", à l'échelle d'une rue ou d'un quartier", constate le rapport.
Selon la Drihl (Direction régionale interdépartementale pour l'hébergement et le logement), les divisions pavillonnaires - la découpe d'un pavillon en petits logements locatifs indignes réalisée par des "propriétaires peu scrupuleux" - ont augmenté de 5% en Seine-Saint-Denis sur la période 2007-2013, comparée à 2003-2009.
Dans ce département, une maison sur cent, aurait été divisée de 2003 à 2013 et dans certaines communes, la division pavillonnaire représente jusqu'à 40% de l'offre de logements. Au tribunal de Grande Instance de Bobigny, "chaque année, 100 à 150 enquêtes sont ouvertes en habitat indigne".
Or malgré un renforcement de l'action publique ces dernières années, via notamment des opérations de requalification des copropriétés dégradées (Orcod), l'arsenal juridique doit être complété, estime le rapport.
Parmi 12 recommandations, il préconise d'"ajouter au nombre des motifs de préemption la lutte contre les marchands de sommeil, moyennant l'édiction d'un droit de préemption approprié".
Il propose aussi de "rendre systématique la confiscation des biens immobiliers utilisés par les marchands de sommeil en cas de condamnation", soit en cas de récidive, soit dès la première condamnation, et d'"interdire l'accumulation de biens aux mauvais payeurs".
Le rapport juge par ailleurs nécessaire, notamment, d'"améliorer le système de fichage des marchands de sommeil", de "doter le droit français d'une définition claire" et "s'accorder sur une définition unique du logement décent" et de "la sur-occupation".
Autres pistes: "créer une police de l'habitat" et "instaurer un mécanisme de financement pour rénover l'habitat vétuste".