WASHINGTON (Reuters) - Le premières auditions publiques dans le cadre de l'enquête préalable à une éventuelle procédure de destitution de Donald Trump ont débuté mercredi à Washington.
Trois diplomates américains qui ont tous exprimé leurs réserves au sujet de l'attitude du président dans l'"affaire ukrainienne" lors de précédentes auditions à huis clos doivent être entendus dans ce cadre.
William Taylor, ancien ambassadeur en Ukraine qui est désormais chargé d'affaires à Kiev, et George Kent, secrétaire d'Etat adjoint chargé des affaires européennes et eurasiennes, ont été entendus mercredi. Marie Yovanovitch, qui a été limogée en mai dernier de son poste d'ambassadrice en Ukraine, le sera vendredi.
"Cette enquête en destitution a pour but de déterminer si le président Trump a cherché à exploiter la vulnérabilité de cet allié et a invité l'Ukraine à s'immiscer dans nos élections", a déclaré Adam Schiff, président de la commission du Renseignement de la Chambre des représentants, à l'ouverture des auditions.
Il s'agit de savoir "si le président Trump a cherché à conditionner des actes officiels, tels qu'une réception à la Maison Blanche ou l'assistance militaire américaine, à la coopération de l'Ukraine à deux enquêtes politiques qui l'aideraient dans la campagne pour sa réélection et, si tel est le cas, de dire si un tel abus de pouvoir est compatible avec ses fonctions", a-t-il poursuivi.
"Notre réponse à ces questions affectera non seulement l'avenir de cette présidence, mais celui de la présidence elle-même et de savoir quel type de comportement ou d'inconduite le peuple américain peut tolérer de la part de son commandant en chef. S'il ne s'agit pas d'une conduite justifiant une destitution, de quoi s'agit-il ?", a ajouté Adam Schiff.
Donald Trump réfute ces accusations et a annoncé mercredi que l'intégralité de la transcription de la conversation téléphonique qu'il a eue avec Volodimir Zelenski, et dont le contenu prête à controverse, serait publiée jeudi.
Il a en outre déclaré ne pas avoir regardé "une seule minute" les auditions publiques qui se sont déroulées ce mercredi.
Les commissions de la Chambre des représentants chargées de l'enquête ont publié ce mois-ci les retranscriptions d'auditions à huis clos effectuées en octobre.
D'après l'un des documents, William Taylor a déclaré que Donald Trump avait conditionné le déblocage d'une aide financière à l'Ukraine à l'ouverture d'une enquête sur la compagnie d'énergie ukrainienne Bourisma dans le but de nuire à Joe Biden, un des favoris de la course à l'investiture démocrate que Donald Trump pourrait donc affronter lors de l'élection présidentielle de novembre 2020, ce qu'il a répété mercredi.
"FOLIE"
"Je ne crois pas que les Etats-Unis puissent demander à d'autres pays de mener des enquêtes ou des poursuites sélectives ayant des implications politiques contre des opposants au pouvoir, car de tels actes sélectifs portent atteinte à la loi, quel que soit le pays", a quant à lui déclaré George Kent.
Selon la retranscription du témoignage à huis clos de William Taylor, il a jugé que l'idée de bloquer une aide militaire au profit d'une campagne politique domestique était selon lui une "folie".
Ce témoignage alimente la thèse des démocrates selon laquelle Donald Trump a demandé une contrepartie à Kiev pour les 391 millions de dollars d'aide destinés à faire face aux séparatistes prorusses de l'est de l'Ukraine - une aide provisoirement suspendue par le président républicain malgré son approbation au Congrès.
La Chambre des représentants a donné son feu vert le 31 octobre à la poursuite de la procédure de destitution contre Donald Trump, en définissant les règles des auditions publiques à venir au Congrès, cherchant ainsi à neutraliser l'argument invoqué par les républicains selon lesquels la procédure était illégitime sans vote en séance plénière à la Chambre.
(Patricia Zengerle et Jonathan Landay; Jean Terzian pour le service français)