Par Laura Sanchez
Investing.com - Les marchés digèrent la hausse de 50 points de base du taux de la BCE d'hier et soulignent le plan anti-fragmentation que Christine Lagarde, la présidente de la BCE, a mentionné lors de sa conférence de presse.
L'instrument de protection de la transmission (IPT) serait utilisé pour éviter que les écarts entre les obligations ne se creusent trop. "Dans une tentative d'éviter un litige juridique (qui se produira presque certainement), une longue liste de critères et de "sauvegardes" opaques et en grande partie dénués de sens ont été ajoutés. Toutefois, comme l'a très clairement indiqué Mme Lagarde, la décision finale appartient au conseil des gouverneurs", explique Azad Zangana, économiste européen senior et stratège chez Schroders (LON:SDR).
"Ce qui importe pour les investisseurs, c'est qu'aucune limite n'est imposée à l'utilisation de cet outil pour le moment, mais il n'y a pas non plus d'engagement sur la taille du fonds. D'après la réaction du marché, il semble que les investisseurs n'aient pas été impressionnés. Il est clair que la BCE s'attend à ce que le TPI ressemble au programme OMT (Outright Monetary Transactions). Un outil qui a été dévoilé par la BCE précédemment, alors dirigée par Mario Draghi, en 2012 pour aider les gouvernements périphériques, et qui a finalement réussi sans jamais être utilisé", ajoute Zangana.
"Ainsi, dès le départ, le plan visant à éviter la fragmentation de la dette européenne, c'est-à-dire des primes de risque devenant incontrôlables, a toutes les apparences d'un plan de relance monétaire ou QE comme tous les précédents. Avec l'inconvénient qu'il n'est pas très précis sur des questions aussi importantes que le montant", explique Víctor Alvargonzález, directeur stratégique et associé fondateur de Nextep Finance.
Les détails
Comme le souligne M. Alvargonzález, "si l'on regarde dans le détail, des choses intéressantes apparaissent, par exemple quand cela pourrait se terminer et ce que cela dit, plus ou moins littéralement, c'est soit que l'on constate que le processus de transmission s'améliore - c'est-à-dire que les primes de risque ne deviennent pas incontrôlables - soit que l'on conclut que les tensions sont dues aux fondamentaux de l'économie en question".
"C'est très important : si les pays ne font pas plus pour améliorer leur solvabilité, ils pourraient perdre le parapluie du programme. C'est un message adressé à l'Italie mais aussi à l'Espagne, même s'il reste à voir si la BCE sera en mesure de retirer son aide, et ce que cela signifierait. Mon opinion est que ce paragraphe est mis en place pour satisfaire l'Allemagne et les autres pays du Nord", ajoute cet expert.
Selon M. Alvargonzález, plus on analyse le plan, moins il a de sens, ou du moins il a un sens politique, car pour être défendu par ce programme, il faut remplir ces conditions :
- Respect du cadre fiscal établi par l'UE.
- Absence de déséquilibres macroéconomiques majeurs.
- Viabilité budgétaire et trajectoire viable de la dette publique.
- Une politique macroéconomique saine.
"La question est évidente : à laquelle de ces conditions l'Italie répond-elle ? Et ce n'est pas comme si l'Espagne excellait dans l'un ou l'autre de ces domaines. Mais le programme a été mis en place pour contrôler les primes de risque de l'Italie et de l'Espagne. Tout cela est un peu bizarre", déclare l'associé fondateur de Nextep Finance.
"Au final, ce qu'ils vont obtenir avec le manque de concret, le fait de ne pas avoir établi un cadre clair et, très important, un montant concret qui, de toute façon, aurait dû être illimité pour être crédible, c'est que les marchés vont très probablement tester la solidité, la force et la détermination de la BCE le moment venu", ajoute-t-il.
"Logiquement, l'euro, qui avait été soutenu par la hausse des taux, s'est essoufflé lorsque les détails du plan anti-fragmentation ont été connus", conclut Alvargonzález.