par Sophie Louet
PARIS (Reuters) - Nicolas Sarkozy, qui a porté "Les Républicains" samedi sur les fonts baptismaux, s'est engagé à favoriser l'avènement d'une "République de la confiance" face au "coup de force permanent" de la gauche et à l'"impasse" du Front national.
L'ancien chef de l'Etat, déjà entré en campagne contre François Hollande et Marine Le Pen, a appelé à la mobilisation pour l'élection présidentielle de 2017 sans dire un mot de la compétition interne à venir, la primaire de 2016.
"La France ne peut pas être condamnée à choisir entre le terrifiant spectacle du drame familial des Le Pen et la terrifiante médiocrité de ceux qui nous gouvernent", a-t-il lancé sous les applaudissements de quelque 15.000 cadres et militants réunis à Paris pour le congrès fondateur de la formation de droite.
"Que pèsent nos rivalités personnelles par rapport à cet enjeu ? Rien !", a-t-il souligné.
"Unité" était certes le mot d'ordre officiel du jour, mais les rivalités et leurs fausses notes ont tout de même affleuré dans la litanie de discours qui, dans un hangar transformé en fournaise, ont mis les "Républicains" sur orbite présidentielle.
Alain Juppé, à ce jour le rival le plus sérieux de Nicolas Sarkozy pour l'investiture présidentielle à droite, a ainsi été hué et sifflé par une partie de la salle. François Fillon, autre candidat déclaré à la primaire, a lui aussi été hué, dans une moindre mesure.
"Certains d'entre vous me sifflent, ça me fait de la peine, mais ça ne change pas ma détermination", a répliqué le maire de Bordeaux, qui avait déjà été chahuté en février lors du conseil national de l'UMP alors qu'il prônait l'union avec le Centre.
"L'APAISEMENT", PAS "LA REVANCHE"
Comble de l'infortune pour Alain Juppé, son discours a été avorté en toute fin par les vivats de militants sarkozystes qui ont salué par des "Nicolas ! Nicolas !" l'arrivée de leur champion.
"On ne fait rien de bon dans la division. (...) Notre société a besoin d'apaisement, pas de revanche", avait auparavant mis en garde l'ancien Premier ministre.
Soucieux de ne pas ternir la grand'messe de l'alternance, Nicolas Sarkozy, qui lui a succédé à la tribune, a lancé : "Un homme d'Etat comme Alain Juppé, c'est une richesse pour nous".
En coulisses, des "juppéistes" confiaient que les jeux étaient "loin d'être faits" malgré l'apparence de "sacre" sarkozyste renvoyée par le congrès de La Villette.
Nicolas Sarkozy a pris soin de s'inscrire sous le sceau du rassemblement, oscillant entre le "je" et le "nous", pour exposer, à défaut de propositions, la philosophie des "Républicains".
"Nous avons reconstruit la confiance entre nous. (...) Nous devons maintenant redonner confiance aux Français dans la politique", a-t-il dit.
"Je vous propose de construire la République de la confiance", a-t-il poursuivi après avoir fustigé en termes vifs l'"abandon" et la "trahison" de la République par la gauche.
Si les flèches les plus acérées ont été réservées à François Hollande, Nicolas Sarkozy a aussi attaqué le programme du Front national : "Je déteste le repli sur soi, la rétractation, la frilosité, la fermeture". "Au fond je déteste les extrêmes parce que je refuse les impasses".
"LA FRANCE SOCIALISTE, ÇA SUFFIT !"
D'images d'archives célébrant l'homme du 18 juin 1940 en messages rappelant l'appel au rassemblement de Jacques Chirac en 1976 lors de la création du RPR, le congrès s'est inscrit dans la lignée gaulliste tout en déclinant les thèmes de prédilection du FN : lutte contre le communautarisme, contre "la repentance insupportable", rétablissement de l'autorité, réduction de la délinquance, défense de la laïcité, souveraineté...
Une ébauche de programme dont le balancier idéologique penchait nettement à droite.
"Aujourd'hui, la droite est de retour et elle est enfin à nouveau fière de ses valeurs. (...) C'est l'heure du renouveau, c'est l'heure de la refondation", a résumé le secrétaire général de l'ex-UMP Laurent Wauquiez, tenant de la "droitisation".
Les autres intervenants, des centristes aux sarkozystes, ont aussi sonné la charge pour 2017, fustigeant tour à tour François Hollande et son "socialisme décrépi", Manuel Valls qui "asphyxie la République" et les "démolisseurs" de gauche telles les ministres Najat Vallaud-Belkacem (Education) et Christiane Taubira (Justice), cibles de choix.
"La France socialiste, ça suffit ! (...) Maintenant la République nous appelle", a martelé l'ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin sous les applaudissements.
Dans l'exaltation du moment, l'ancien Premier ministre François Fillon a mis en garde contre l'alternance pour l'alternance qui serait mue par la seule soif de revanche.
"A lire les sondages, tout le monde semble capable de renvoyer François Hollande à sa normalité. Mais la question centrale à laquelle il nous faut répondre, c'est pour quoi faire et comment le faire ?", a dit l'ancien Premier ministre. "Il ne nous est pas permis de décevoir".
Réponse à distance de Nicolas Sarkozy : "Prenons garde à ce que nous promettons demain pour être absolument certain de pouvoir le tenir après-demain".
(avec Chine Labbé et Michel Rose) 2015-05-30T165010Z_1007180001_LYNXMPEB4T09J_RTROPTP_1_OFRTP-FRANCE-REPUBLICAINS-SARKOZY.JPG