Après des mois de psychodrame, la zone euro a affiché samedi sa sérénité à l'approche des élections grecques qui ne devraient pas fondamentalement remettre en cause, selon elle, les engagements pris par Athènes pour obtenir un troisième plan d'aide.
"Il n'y a pas de raison particulière d'être inquiet aujourd'hui", a jugé Michel Sapin, le ministre français des Finances, reflétant le sentiment ambiant lors d'une réunion avec ses homologues européens à Luxembourg.
"Tous les partis susceptibles d'être au pouvoir d'une manière ou d'une autre ont voté le plan, ce n'est pas compliqué, cela donne une stabilité", a analysé M. Sapin.
"J'ai la sensation, y compris si je regarde les sondages, qu’il y a toujours une très nette majorité pour les partis qui ont soutenu la démarche" d'un nouveau programme d'aide en échange de réformes, a estimé Pierre Moscovici, le commissaire européen aux Affaires économiques, à propos du scrutin législatif du 20 septembre.
L'ex-Premier ministre grec Alexis Tsipras a précipité ces élections en démissionnant le 20 août, après une scission au sein de son parti Syriza en réaction au lancement du troisième plan de sauvetage financier du pays.
C'est la troisième fois cette année que les Grecs sont appelés à voter, après les élections de janvier qui ont amené Syriza au pouvoir et le référendum sur les mesures d'austérité, qui a failli déchirer la zone euro.
Lors des deux scrutins, la Commission européenne n'avait pas caché ses inquiétudes, s'ingérant même dans la campagne. Pour le référendum du 5 juillet, son patron, Jean-Claude Juncker, avait fait activement campagne pour le "oui". "Un "+non+ voudrait dire (...) que la Grèce dit +non+ à l'Europe", avait-il lancé. Le "non" l'avait emporté très largement.
- 'Climat positif' -
Cette semaine, lors d'un discours sur l'état de l'UE, M. Juncker s'est contenté de demander aux Grecs "qu'ils tiennent parole et respectent l'accord quel que soit le gouvernement qui gouverne", concentrant l'essentiel de son discours sur la crise des migrants.
Même au sein de l'Eurogroupe, le forum des ministres des Finances de la zone euro, le ton est plus apaisé qu'en juillet.
Dans un communiqué, le ministère grec des Finances s'est félicité que "le climat particulièrement positif engendré après l'accord d'août (qui a validé le plan d'aide) ait été réaffirmé pendant la réunion de l'Eurogroupe" à Luxembourg.
L'Autrichien Hans-Jörg Schelling, pourtant du camp des faucons vis-à-vis d'Athènes, s'est dit "convaincu que la Grèce va faire ce qui a été convenu". "Quand la campagne électorale sera finie, on arrivera au résultat selon lequel tous respecteront ce qui a été convenu", a-t-il prédit.
Selon un sondage publié vendredi, Syriza recueillerait 28,5% des voix, devançant de cinq points le parti conservateur Nouvelle Démocratie (ND). D'autres sondages donnent ces deux formations, favorables aux réformes exigées par Bruxelles, au coude à coude.
Malgré le calme manifesté par les Européens, il n'y aura pas de temps à perdre après les élections car de nombreuses étapes sont attendues en octobre --dont la première "revue" des créanciers pour décider ou non du déblocage de nouveaux fonds en fonction de l'avancée des réformes--, ainsi qu'une décision cruciale sur la dette grecque.
D'un engagement des Européens à réduire la dette --qui doit grimper à 200% du PIB avec le nouveau programme de 86 milliards d'euros-- dépend la participation du FMI au plan d'aide à la Grèce, jugée indispensable par un pays comme l'Allemagne.
"Le débat sur la restructuration de la dette grecque va être intense en octobre et en novembre, en admettant que tout se passe bien avec la première revue", admettait samedi un observateur.
Dans tous les cas, la Grèce aura besoin d'argent frais "avant la fin de l'année", soulignait une source proche des discussions, sans préciser les prochaines grandes échéances de remboursement.
Athènes a jusqu'ici reçu 13 milliards d'euros de la zone euro. Cette somme a principalement servi à rembourser la BCE et un prêt-relais fourni en urgence courant juillet.
Dans son communiqué de samedi, le ministère grec des Finances a souligné qu'Athènes respectait l'échéancier de l'accord avec ses créanciers tout en rappelant "la nécessité de préparer les discussions sur un allègement de la dette, attendues immédiatement après la première revue".