La prestigieuse avenue des Champs-Elysées se transforme plus que jamais en une vitrine de la mode avec l'arrivée annoncée de nouvelles marques, comme Banana Republic, que la flambée des loyers ne décourage pas.
"C'est dramatique, on n'ira plus désormais aux Champs pour se distraire, ce ne sera plus qu'une avenue textile", déplore auprès de l'AFP l'adjointe au commerce à la Mairie de Paris, Lyne Cohen Solal (PS).
L'un des derniers bureaux de service public, La Poste, encore présents sur la "plus belle avenue du monde", fermera ses portes fin janvier, après une multiplication par cinq de son loyer. De quoi donner du grain à moudre à ceux qui dénoncent l'envahissement de cette adresse emblématique par les grandes enseignes du textile, même si on ne connaît pas encore l'identité du remplaçant.
"L'arrivée en masse de grandes chaînes internationales ne fait qu'augmenter les loyers et contribue à faire partir les cinémas, restaurants et l'ensemble de l'offre culturelle", dénonce Mme Cohen Solal. Le loyer que paie le cinéma UGC Normandie, installé sur l'avenue, représente son chiffre d'affaires, assure l'élue.
Le textile représente désormais 40% de l'offre commerciale actuellement aux Champs-Elysées, selon la mairie, qui s'était opposée sans succès à l'implantation en octobre dernier de la chaîne H&M.
Les Champs-Elysées, avec ses 100 millions de passants par an, sont la cinquième artère commerciale la plus chère du monde. Le loyer y était estimé à 10.000 euros par mètre carré l'année dernière, soit 500 euros de plus par rapport à 2009, selon la société de conseil en immobilier commercial Cushman & Wakefield.
"C'est un procès injuste", répond pour sa part Jean-Marc Génis, président de la Fédération des enseignes de l'habillement (FEH). La célèbre avenue bénéficie, selon lui, d'un équilibre entre équipement de la personne (textile, chaussures), loisirs-culture (Virgin, Fnac, restaurants, cinémas, théatres, musées, automobile) et boutiques de luxe (Vuitton, Cartier...).
A l'image des autres grandes avenues dans le monde, les Champs-Elysées, qui attirent beaucoup de monde, sont devenues un rendez-vous "incontournable" des grandes marques, selon M. Génis.
L’enseigne de vêtements Abercrombie & Fitch, connue pour ses mannequins torse nu, est attendue en février. Suivra la marque haut de gamme de Gap, Banana Republic. Quant à Tommy Hilfiger, il a ouvert en novembre dernier.
Premier signe de frémissement de la reprise économique ou tout simplement le besoin de s’afficher sur "la plus belle avenue du monde"?
"C'est une adresse prestigieuse donnant accès aux clients, aux fournisseurs et aux investisseurs. C'est le +jackpot+", confie un expert du secteur.
Les groupes textiles ont dégagé des marges bénéficiaires sans équivalent en 2010, mais la palme est revenue au secteur du luxe dont les bénéfices ont atteint des niveaux record.
L'optimisme retrouvé de la mode a remis la France au centre des intérêts des créateurs qui, malgré le dynamisme du marché asiatique, n'ont pas oublié que Paris reste la vitrine de la mode mondiale, avance Marc Génis.
A la Mairie de Paris, on redoute que la multiplication des enseignes textiles ne banalise la célèbre avenue. "Elles vont tuer la poule aux oeufs d'or", estime Mme Cohen Solal, car dit-elle, "la mode se sert des Champs-Elysées sans rien leur donner en retour".