Affichant sa bonne santé financière et ses 11 millions d'abonnés, le groupe de télévision payante Canal+ France a franchi jeudi la première étape d'une introduction en Bourse de 20% de son capital prévue fin mars ou début avril.
"C'est un jour important, c'est la première étape du processus d'introduction en Bourse de Canal+ France, mon équipe et moi-même (en) sommes très fiers", a commenté son PDG, Bertrand Meheut.
Canal+ France a enregistré mercredi soir son document de base auprès de l'Autorité des marchés financiers (AMF), lançant par là formellement l'opération, qui devrait avoir lieu fin mars-début avril.
Les 20% du capital proposés aux investisseurs appartiennent à Lagardère, qui souhaite se désengager et n'a pu trouver l'an dernier d'accord pour un rachat avec l'actionnaire de référence du groupe, Vivendi, qui détient les 80% restants. Ce dernier n'était pas immédiatement disponible pour commenter ces informations.
"Cette opération va permettre aux investisseurs particuliers et aux institutionnels d'accéder à une partie du capital du leader de la télévision payante en France. L'image de nos marques, en particulier Canal+ et CanalSat, est un atout important pour cette opération : 100% des Français connaissent Canal+ et plus de 90% CanalSat", a affirmé M. Meheut.
Canal+ France est une filiale du groupe Canal+. Avec 11 millions d'abonnés, elle regroupe l'activité de télévision payante dans les pays francophones (France métropolitaine, DOM-TOM et Afrique) et représente de fait l'essentiel de Canal+, lui-même déjà coté à Paris.
Le bénéfice net 2010 de Canal+ France s'est établi à 357 millions d'euros en 2010, en hausse de 15,9% par rapport à 2009, et son chiffre d'affaires a progressé en un an de 3,1% à 3,956 milliards d'euros.
Ces recettes proviennent majoritairement des abonnements, dont le nombre en France métropolitaine a augmenté de 150.000 fin 2010 par rapport à fin 2009, ce qui permet aux chaînes cryptées du groupe d'être présentes "dans un foyer sur quatre" dans l'Hexagone, selon M. Meheut.
Les analystes interrogés par l'AFP doutaient toutefois que l'opération aboutisse. "Je ne serais pas surpris qu'in fine, le deal ne se fasse pas", résumait jeudi en milieu de journée un analyste de la place parisienne.
La part de Lagardère est valorisée entre 1 et 1,5 milliard d'euros, or le groupe pourrait demander 1,35 milliard d'euros, selon des informations parues dans la presse.
"Cela ne nous semble pas atteignable, le marché n'en voudra pas à ce prix étant donné la structure compliquée du groupe, qui ne paierait pas de dividende, car la trésorerie est récupérée par Vivendi, et n'enregistrera pas beaucoup de croissance", résumait Conor O'Shea, analyste chez Kepler Capital Markets.
"Vivendi peut alors arriver à la dernière minute en offrant 4 ou 5% de plus, et ils pourront se mettre d'accord entre eux", selon lui.
"Nous considérons que le modèle économique de Canal+ France est très attractif", a au contraire plaidé jeudi M. Meheut, disant s'attendre à "un développement économiquement très favorable (...) sur le long terme".
Le chiffre d'affaires de Canal+ devrait progresser de 2 à 3% par an dans les années à venir et sa marge brute opérationnelle (Ebitda) dépasser en 2011 les 20%, ce qui devrait, selon M. Meheut, améliorer la génération de trésorerie positive.
Canal+ a demandé jeudi matin la suspension de sa cotation à Paris, pour les journées de jeudi et vendredi, en raison de la divulgation d'informations sur sa propre santé financière dans le document de base de sa filiale Canal+ France. Celles-ci doivent encore être validées par son conseil d'administration vendredi.