Nicolas Sarkozy a lancé mercredi les travaux de la commission confiée à Alain Juppé et Michel Rocard pour définir dans les deux mois les "priorités stratégiques" du "grand emprunt national" annoncé pour 2010, sans donner de détails sur son montant ni ses modalités.
Dans une courte allocution, le chef de l'Etat a demandé aux deux ex-Premiers ministres et aux 22 autres économistes, scientifiques, hauts fonctionnaires ou chefs d'entreprises de tous bords de "projeter (leur) réflexion au-delà de l'horizon de la crise" afin de dégager "les investissements les plus utiles dans une vision de long terme".
"Avec le Premier ministre, nous avons orienté le plan de relance (...) vers les investissements les plus rapides à réaliser pour soutenir la conjoncture. Les signaux positifs (de reprise) nous appellent à penser dès à présent à l'après-crise", a-t-il poursuivi.
Sans surprise, Nicolas Sarkozy a identifié "trois défis majeurs" sur lesquels il a souhaité les lumières des experts de la commission.
D'abord "l'économie de la connaissance", estimant qu'"un pays comme la France ne gardera son niveau de vie et sa cohésion sociale qu'en élevant son niveau général de qualification". Puis "le renforcement des entreprises innovantes et exportatrices", notamment des PME.
Il a enfin souhaité un inventaire des "filières de demain" qui nécessitent des "investissements industriels, stratégiques, scientifiques et technologiques", citant pêle-mêle l'énergie solaire, les énergies marines, la fibre optique, les nanotechnologies ou les biotechnologies.
"La finalité ultime de ces investissements, c'est de répondre aux besoins de la France de demain", a-t-il résumé.
"Ca ne doit pas être un emprunt comme les autres", a abondé Alain Juppé devant la presse au terme de la réunion. "Il faut trouver et relancer les efforts publics essentiels mais naufragés parce que jamais urgents dans une perspective économique", a renchéri Michel Rocard.
S'il a reconnu le poids de la dette du pays, Nicolas Sarkozy s'est refusé à "borner la réflexion" de la commission "à un cadre budgétaire précis". "Le montant de l'emprunt national dépendra des besoins que vous allez identifier et de la capacité d'endettement que nous aurons", a-t-il dit.
A l'issue de la réunion, Alain Juppé a toutefois précisé que le président avait demandé "une fourchette" sur le montant de l'emprunt.
Le chef de l'Etat n'a pas été plus disert sur les modalités que prendrait l'emprunt, refusant de trancher entre l'appel aux Français ou aux marchés financiers. "Nous prendrons (...) la solution la plus efficace et la moins coûteuse", s'est-il contenté d'indiquer.
A quelques jours de la nomination attendue d'un secrétaire d'Etat radical de gauche dans le cadre du "mini remaniement" annoncé depuis juin, Nicolas Sarkozy ne s'est pas privé de souligner le caractère oecuménique de l'organe coprésidé par deux ex-chefs de gouvernement de droite et de gauche.
"Franchement, que deux hommes qui ont cette qualité acceptent de travailler ensemble pour réfléchir à l'avenir de notre pays, ça devrait réjouir tout le monde", a-t-il jugé, "c'est pas la peine d'invoquer le siècle des Lumières (...) et d'être sectaire".
Parmi les personnalités "d'ouverture" de la commission figurent notamment l'ex-secrétaire générale de la CFDT Nicole Notat, le président de la Fondation Terra Nova, proche du PS, Olivier Ferrand ou l'ex-conseiller de François Mitterrand et écrivain Erik Orsenna.