Le nouveau chef du gouvernement italien Mario Monti, qui a engagé une course contre la montre avec les marchés, présente jeudi au Sénat un programme acrobatique d'austérité et relance économique pour sortir le pays de la tourmente qui secoue la zone euro.
Son discours sera d'abord "destiné à rassurer les marchés et chancelleries étrangères" alors que l'Italie doit restaurer au plus vite la crédibilité perdue dans les derniers mois de l'ère Berlusconi, estime le quotidien de gauche Repubblica.
L'ex-commissaire européen s'adressera à 12H00 GMT aux sénateurs, appelés ensuite à voter la confiance au gouvernement en soirée, un scrutin qui laisse peu de doutes sur son issue. Les médias tablent sur un score record de plus de 290 voix pour l'aval au gouvernement sur 321 sièges, puisque seule la Ligue du nord, parti populiste ex-allié de Berlusconi, est passée à l'opposition.
Vendredi à mi-journée, il ira à la Chambre des députés où il devrait obtenir plus de 550 voix sur 630.
"Assainissement, croissance et cohésion sociale" seront les mots d'ordre du gouvernement, a affirmé jeudi à la radio la nouvelle ministre des Politiques sociales, Elsa Fornero, en insistant aussi sur l'"équité".
Pour Repubblica, M. Monti rappellera dans son discours la nécessité de "sacrifices" tout en insistant sur "les ressources dont dispose l'Italie" pour surmonter la phase actuelle. Le pays lourdement endetté (1.900 mds d'euros, 120% du PIB) est menacé d'asphyxie en raison de la montée vertigineuse des taux obligataires à 10 ans (autour de 7%).
Une fois les votes de confiance encaissés, M. Monti effectuera la semaine prochaine une tournée des capitales européennes, s'arrêtant à Bruxelles, Berlin, Paris, Londres.
Félicitant M. Monti dans une lettre, la chancelière allemande Angela Merkel a souligné "les grands espoirs" qu'il suscite et l'a appelé à "mettre en oeuvre rapidement des réformes décisives et nécessaires".
Pour l'économiste et politologue italienne de renom Loretta Napoleoni, qui enseigne à la Judge Business School de Cambridge en Grande-Bretagne, le changement de gouvernement ne suffira pas à calmer durablement les marchés.
"Le danger", explique-t-elle sur le site www.ilfatto.it (gauche), c'est que M. Monti comme son collègue grec Lucas Papademos, "deux eurocrates convaincus, continueront de suivre la politique européenne de défense de l'euro et d'austérité sans rien objecter, précipitant l'UE dans sa pire récession depuis 1929".
Soutenu pour le moment par l'opinion publique, M. Monti a soigneusement pris en charge l'économie comme garantie qu'il tiendra les objectifs d'austérité fixés tout en créant un super-ministère pour relancer la croissance.
"Une croissance durable et des emplois", a promis le titulaire de ce ministère regroupant Développement économique, Infrastructures et Transports, Corrado Passera, auparavant patron de la deuxième banque italienne Intesa San Paolo.
Le Corriere della Sera a souligné "l'image de sérieux, de compétence et fiabilité" donnée par le nouvel exécutif mais s'est inquiété des inconnues à l'horizon surtout sur le plan de la politique intérieure.
Une fois la période de grâce passée, l'attitude des partis pour le moment contraints à une union de façade pourrait changer, alors que M. Monti compte rester au pouvoir jusqu'à la fin de la législature au printemps 2013.
Pour les experts, le professeur d'économie pour conserver son fauteuil devra mécontenter un peu tout le monde. Il devrait jongler en restaurant par exemple certains impôts comme celui sur l'habitation principale ou en créant un impôt sur le patrimoine, au risque de s'aliéner les voix de la droite. Tout en mécontentant syndicats et partis de gauche car il a prévu de réformer le marché du travail ou les retraites.
Le chef du gouvernement sortant Silvio Berlusconi a déjà annoncé la création d'une sorte de "gouvernement ombre" qui donnera son avis sur les mesures de l'exécutif et préparera des contre-réformes en vue de la future campagne électorale.
Toutefois, selon la Stampa, M. Monti est conscient des risques, raison pour laquelle il a choisi des "technocrates avec un cerveau politique", capables de gérer conflits et situations complexes.