Parmi les doléances du personnel de Pôle emploi, qui élit ses représentants à partir de cette semaine, le manque de bureaux est cité comme une source d'inconfort majeur rejaillissant sur les chômeurs, de même que l'absence de système informatique commun entre ex-ANPE et ex-Assedic.
Alors que la crise a aggravé le stress et la charge de travail, les syndicats déplorent que direction et pouvoirs publics n'aient pas assez prêté attention aux aspects concrets de la fusion.
Le regroupement en sites mixtes n'a pas résolu un problème déjà identifié en 2005 à l'ANPE : le "nomadisme", lié au changement de tâches par demi-journées, et l'absence de bureaux attitrés.
Qui dit "site mixte" ne dit pas forcément site unique. Les agents se partagent entre plusieurs locaux, et sur un même site, on compte un bureau pour deux ou deux bureaux pour trois. "Ce n'est pas figé, la charte d'aménagement est en cours d'élaboration", assure la direction.
"On a des bannettes avec nos notes personnelles qu'on balade de droite à gauche", explique Virginie, 26 ans, entrée à l'Assedic il y a quatre ans à Paris.
Une expertise remise en octobre par le cabinet Technologia au comité d'hygiène et de sécurité (CHSCT) de Pôle emploi en Poitou-Charentes constate que "bien souvent chaque matin, c'est la course à la recherche d'un bureau".
"Pour les agents de l'ex-Assedic, le modèle de l'ex-ANPE est clairement identifié comme une dégradation des conditions de travail (...) Plus que de disposer d'un bureau individuel, ce qui leur apparaît très important, c'est d'être dans un environnement de travail permettant d'assurer l'ensemble des activités avec discrétion voire confidentialité avec le demandeur d'emploi", alors que "l'acoustique d'une façon générale est négligée", ajoute le rapport obtenu par l'AFP.
Pour Muriel Prévot, chercheuse en ergologie à l'université de Provence, "le problème des bureaux est pratiquement un épiphénomène par rapport à la charge de travail et l'outil informatique qui ne fonctionne pas. C'est le moyen qu'ont trouvé les agents pour alerter sur leur souffrance".
Avec la fusion, la pérégrination des agents se double d'un "nomadisme des fichiers informatiques", selon le syndicat Snu, car le futur système commun Neptune entre seulement en phase test. En attendant, "les manipulations restent encore un peu complexes mais c'est en train de se régler", reconnaît la direction.
"Sur site ex-ANPE, le directeur, s'il est un ex-Assedic, travaille comme invité, et tout disparaît s'il ferme sa session informatique, à moins de sauvegarder sur une clé USB et de se trimballer avec", selon la CFDT.
Preuve de la sensibilité du sujet, un trait d'humour présidentiel lors d'un déplacement dans l'Orne en septembre a suscité une centaine de réactions sur un site interne www.la fusionpourlesnuls.com.
"J'ai beaucoup d'admiration pour les fonctionnaires de Pôle emploi. Imaginez ce que je leur ai fait subir, d'abord un changement de métier pas simple, deuxièmement, un changement de locaux", avait lancé Nicolas Sarkozy, plaisantant sur "les petits bureaux où aimaient travailler certains de nos fonctionnaires" avec "l'affiche de la Polynésie pour rêver, ou l'orchidée dont on s'occupe".
"Heureusement qu'il y a le poster et l'orchidée", a réagi, ironique, une salariée, "parce qu'en ce qui concerne nos postes de travail, il manque des ordinateurs, des logiciels de travail dignes de ce nom, des bureaux et pas les box que vous nous avez octroyés avec aucune confidentialité, des zones de réception employeur indignes des entreprises que nous recevons, etc...".