La Banque centrale européenne (BCE) a fait ce qu'on attendait d'elle jeudi, abaissant son principal taux directeur à un plus bas niveau historique même si elle a peu d'espoir que cela permette de faire redémarrer le moteur économique de la zone euro.
L'institution monétaire, réunie comme deux fois par an hors ses murs de Francfort, à Bratislava, a porté ce taux à 0,5%.
Ce nouvel assouplissement monétaire amène désormais le taux européen non loin du niveau quasi nul du taux de la Réserve fédérale américaine depuis 2008.
La dernière baisse remonte à juillet, avec un taux porté à 0,75%.
Le taux des dépôts au jour le jour, auquel les banques privées peuvent placer de l'argent pour 24 heures auprès de la BCE, a été maintenu à 0%, réduisant le corridor par rapport au taux principal. Des responsables de la BCE ont laissé entendre à plusieurs reprises ces derniers mois ne pas pouvoir envisager de le baisser davantage, ce qui l'aurait conduit en terrain négatif, soit une plongée dans l'inconnu.
Le taux de prêt marginal au jour le jour, auquel les banques peuvent emprunter pour la même durée, a été abaissé à 1%.
Début avril, son président Mario Draghi avait déclaré la BCE "prête à agir" via des instruments conventionnels ou non pour combattre la faiblesse économique persistante en Europe, mais les économistes étaient divisés sur le calendrier d'une baisse de taux. Certains l'attendaient plutôt en juin.
Mais la nouvelle détérioration des indicateurs de confiance comme d'activité ont contribué à accélérer cette décision.
En particulier, l'activité privée s'est à nouveau contractée au mois d'avril en zone euro, un mouvement qui a touché l'Allemagne, première économie de la région.
Et Le chômage a lui atteint un nouveau record en mars, touchant 12,1% de la population active totale de la zone euro. En Espagne, le chômage a même atteint 26,7% et 27,2% en Grèce.
"La longue période de faiblesse économique s'étend désormais aux pays les plus solides de l'Union monétaire, avec pour risque que le moteur de sa croissance ne s'essouffle", note Annalisa Piazza, de Newedge.
Face à ces éléments, qui éloignent la perspectives d'une reprise économique au printemps comme envisagé, les appels du pied s'étaient multipliés pour réclamer à la BCE de relâcher davantage encore sa politique monétaire.
Ils ont aussi relancé le débat sur le bien-fondé des politiques d'austérité menées depuis le début de la crise de la dette, destinées à redresser les finances publiques.
Un nouveau relâchement des taux n'aurait cependant que peu ou pas d'effet sur la situation économique, tant que la BCE n'aura pas résolu son problème de transmission de sa politique monétaire, jugent nombre d'économistes. Car l'institution a beau inonder les banques de liquidités bon marché, ces dernières peinent à prêter aux ménages et aux entreprises, en particulier les petites et moyennes, dans les pays les plus en difficulté, ou alors à des taux rédhibitoires.
"Une baisse de taux non accompagnée de mesures exceptionnelles pour réparer le mécanisme de transmission ne fait pas sens", estime ainsi Carsten Brzeski, d'ING.
Début avril, le président de la BCE Mario Draghi avait souligné que son institution réfléchissait à la manière adéquate de surmonter ce souci, sans développer davantage. Jeudi, il pourrait donner des pistes sur la nature des mesures envisagées à défaut d'annonces concrètes, lors de as conférence de presse mensuelle à partir de 12H30 GMT.
Selon les analystes, la BCE a le choix entre élargir la gamme des garanties qu'elle accepte des banques en échange de ses prêts pour les encourager à prêter aux entreprise, participer à un plan d'aide en faveur des PME avec la Banque européenne d'investissement aux commandes ou racheter directement des actifs émis par les entreprises. Autant de mesures qui risquent toutefois de susciter l'opposition de la Bundesbank, selon qui la BCE ne serait pas dans son rôle.