La zone euro s'oriente vers un report de sa décision sur le renforcement de son pare-feu contre la crise de la dette, du fait des fortes réserves de l'Allemagne qui estime qu'il n'y a plus urgence en dépit d'une pression internationale croissante.
La décision sera prise "courant mars" mais pas forcément lors du sommet européen des 1er et 2 mars, a laissé entendre dimanche le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble.
Les dirigeants européens avaient à l'origine prévu de trancher cette question politiquement sensible au mois de mars et plus précisément lors de leur sommet de jeudi et vendredi à Bruxelles.
Mais le mois de "mars va du 1er au 31", a fait valoir M. Schäuble en marge d'une réunion ministérielle du G20 à Mexico. Dans cet intervalle, "nous examinerons la question de savoir si le volume du mécanisme européen de stabilité (MES) est suffisant au vu des derniers événements", a-t-il poursuivi.
Un sommet de la seule zone euro est en principe programmé vendredi matin pour se pencher sur cette question. Il semble en partie compromis à présent.
La décision pourrait être reportée, même si une discussion devrait avoir lieu, avance un diplomate européen. "On laissera le temps" à l'Allemagne, ajoute-t-il en faisant valoir que le contexte politique est délicat dans le pays.
Principal contributeur aux mécanismes de soutien au sein de la zone euro, Berlin fait barrage sur ce dossier, malgré l'intense pression des Etats-Unis, du Fonds monétaire international (FMI) et de ses partenaires européens qui cherchent à mettre fin à une crise qui dure depuis plus de deux ans.
Pour rassurer les marchés sur leur capacité à éviter une contagion, la plupart des pays de la zone euro souhaitent combiner la capacité de prêts du fonds de secours temporaire, le Fonds européen de stabilité financière (FESF), avec celle du MES (500 milliards d'euros en théorie), qui commencera à fonctionner en juillet. Cela permettrait d'obtenir une force de frappe de 750 milliards d'euros. Pour l'instant, Berlin dit vouloir en rester à 500 milliards.
"Faites-le vite et avec force, et faites en sorte que vos engagements soient suivis d'effets", a exhorté ce week-end le secrétaire au Trésor des Etats-Unis, Timothy Geithner, à Mexico.
La chancelière allemande Angela Merkel reste sourde à ces suppliques car elle doit d'abord faire voter lundi le second plan de sauvetage pour la Grèce, une étape dont l'issue ne fait guère de doute, une large majorité de députés s'apprêtant à donner leur feu vert.
Mais les députés de sa coalition, réservés sur le bien-fondé des aides fournies par l'Allemagne depuis le début de la crise, vont saisir l'occasion pour dire non au renforcement du MES, en faisant voter une motion. Il est donc difficile pour la chancelière de relancer le sujet dans l'immédiat.
"L'Allemagne a depuis le début de cette crise sa propre dynamique décisionnelle. Merkel doit souvent temporiser", souligne un diplomate européen.
Autre facteur: Berlin a engagé un bras de fer avec le FMI qui doit lui aussi venir en aide à la zone euro via une augmentation de ses ressources.
Seulement, chaque partie estime que c'est à l'autre de faire le premier pas, le FMI attendant un pare-feu convaincant de la zone euro, tandis que Berlin veut en savoir plus sur les intentions de l'institut dirigé par Christine Lagarde.
Une décision du FMI sur l'accroissement de ses fonds propres est attendue seulement en avril. Du coup, un responsable de la zone euro, sous couvert d'anonymat, n'exclut pas que la zone euro repousse sa décision sur l'augmentation de son Fonds de secours au mois d'avril pour la faire coïncider avec celle du FMI, "avec éventuellement convocation d'un sommet extraordinaire des dirigeants de la zone euro".
D'ici là, le FMI doit décider quelle sera sa participation au second plan d'aide à la Grèce. Compte tenu du blocage sur le pare-feu, il pourrait se contenter d'une contribution limitée, estiment des diplomates.