Le Conseil d'Etat a rejeté mercredi la requête d'une filiale suisse de la banque britannique HSBC visant à faire annuler pour excès de pouvoir la création du fichier Evafisc, destiné à identifier les contribuables français détenant des comptes bancaires à l'étranger.
Dans cette décision dont l'AFP a obtenu copie, le Conseil d'Etat a également estimé que le ministre chargé du Budget était "compétent" pour prendre l'arrêté du 25 novembre 2009 qui a créé ce fichier, contrairement à ce qu'avançait la société requérante, HSBC private bank (Suisse) SA.
Le fichier Evafisc sert de base pour les contrôles du fisc dans le cadre de la lutte contre la fraude internationale avec les paradis fiscaux. Il est alimenté par les services fiscaux ou par des établissements bancaires en vertu du "droit de communication" prévu par le livre des procédures fiscales.
Peu après sa mise en place, il a reçu des données récupérées dans des fichiers saisis au domicile français d'un ancien salarié d'HSBC à Genève, Hervé Falciani, lors d'une perquisition menée à la demande des autorités suisses.
"Pour l'instant, nous n'avons aucun commentaire. Nous voulons prendre le temps d'analyser les motivations du Conseil d'Etat", a précisé à l'AFP un porte-parole d'HSBC en Suisse.
De son côté, le ministère français du Budget a relevé que "cette décision valid(ait) les moyens utilisés par l'Etat pour lutter contre la fraude fiscale".
HSBC avait demandé le 11 mars 2010 au Conseil d'Etat de suspendre l'application de l'arrêté de novembre 2009 et d'interdire toute utilisation d'Evafisc, dans l'attente du jugement sur le fond. Le juge des référés du Conseil avait rejeté cette requête le 19 avril 2010.
Le décryptage des fichiers récupérés chez M. Falciani a permis d'identifier 127.000 comptes appartenant à 79.000 personnes dont 8.231 Français, avait annoncé le procureur de Nice, Eric de Montgolfier, en avril 2010 lorsqu'il était en charge du dossier.
Le fisc français avait pour sa part affirmé que les fichiers lui avaient permis de constituer une liste de 3.000 fraudeurs français présumés.
L'utilisation de ce fichier par la justice française a provoqué une vive polémique, frôlant l'incident diplomatique, entre la France et la Suisse.