Le gouvernement, pris en tenaille entre la croissance atone et la nécessité de ne pas trop se relâcher sur la réduction des déficits, est à la recherche du moindre euro d'économies, ce qui ne va pas sans créer des tensions avec certains ministères.
Les lettres de cadrage budgétaire aux différents ministres, fixant les principales orientations en matière de dépenses pour 2014, vont être envoyées "d'ici 15 jours", a indiqué lundi une source gouvernementale, soit au moins quatre semaines plus tôt que d'habitude.
L'entourage du ministre délégué au Budget, Jérôme Cahuzac, s'attend à des discussions "plus dures que jamais", selon les termes du Figaro lundi.
Le ministre de l'Economie et des Finances, Pierre Moscovici, a voulu donner le "la" en affirmant sur RTL que, sur les trois leviers possibles pour réduire les déficits (croissance, baisse des dépenses, pression fiscale), la "réduction des dépenses doit être privilégiée".
Une cure qui se fera notamment dans le cadre de la "modernisation de l'action publique", mise en place par Matignon, a-t-il rappelé.
Mais dans le même temps, la ministre du Logement, Cécile Duflot, plaidait sur France Info pour "un devoir d'investissement". Signe des tensions à venir, elle avait argué dès dimanche que son "ministère" participait "à l'effort collectif, bien plus que d'autres en ce qui concerne les effectifs".
Sa collègue de l'Ecologie, Delphine Batho, affirmait de son côté qu'on était "au maximum de ce qu'on peut faire en terme d'économie et de réduction des dépenses".
Les discussions pourraient aussi être rudes, comme elles l'ont été lors de la préparation du budget 2013, avec la ministre de la Culture, Aurélie Filippetti.
Le gouvernement s'est déjà engagé à faire 10 milliards d'euros d'économies par an sur la dépense publique pendant cinq ans pour réduire les déficits.
Il a prévu aussi 10 milliards d'économies annuelles pour financer une partie des crédits d'impôts accordés aux entreprises afin de relancer leur compétitivité, avec une montée en charge sur deux ans en 2014 et 2015.
Début janvier, Jérôme Cahuzac avait annoncé que la réserve de précaution du budget pour 2013 serait majorée de 2 milliards d'euros pour financer un éventuel surcoût des politiques gouvernementales en faveur de l'emploi. Cette somme serait financée par de nouvelles économies au sein des différents ministères, avait-il précisé.
Le 12 février, le gouvernement a annoncé que les dotations aux collectivités locales baisseraient de 1,5 milliard d'euros en 2014 et d'autant en 2015, soit deux fois plus qu'initialement prévu.
Selon Les Echos, il va falloir trouver 4 à 5 milliards d'économies supplémentaires l'an prochain, un chiffre non confirmé par Bercy.
Le tabou est à présent levé sur l'objectif de croissance de 0,8% du gouvernement cette année, le président François Hollande ayant laissé entendre le 12 février qu'il n'excluait pas un ajustement "dans les prochains jours".
Une croissance atone a un impact mécanique sur un autre objectif, celui d'un déficit public réduit à 3% du PIB fin 2013, au lieu de 4,5% fin 2012. Elle est en effet synonyme de recettes fiscales ralenties, de PIB moins élevé que prévu et donc de déficit gonflé en comparaison.
Le gouvernement a admis qu'il n'atteindrait pas ce deuxième objectif à la date prévue. Le G20, qui a lâché un peu de lest sur la rigueur budgétaire lors de sa réunion de samedi à Moscou, va "permettre de ne pas ajouter l'austérité à la récession", avait déclaré samedi M. Moscovici.
L'exécutif avait promis la stabilité fiscale dès 2014. Va-t-il devoir à présent augmenter les impôts? "Nous ne souhaitons pas, pour l'essentiel, que ce soient les recettes qui soient appelées, parce qu'en effet, il y a une pression fiscale forte dans ce pays", a déclaré lundi M. Moscovici. "Pour l'essentiel", a-t-il néanmoins répété.