La Commission européenne a lancé la chasse aux gaspillages alors que se prépare une bataille à couteaux tirés en vue d'établir le prochain budget de l'UE en période de rigueur généralisée.
Le maître du jeu est le Premier ministre britannique David Cameron. Il a scellé en décembre dernier une alliance avec la France, l'Allemagne, les Pays-Bas et la Finlande pour imposer un gel du budget de l'UE jusqu'en 2020.
Ces cinq pays représentent 50% des contributions au budget de l'UE. La Commission européenne se retrouve désormais le dos au mur. Elle doit présenter fin avril un projet de budget pour 2012, puis deux mois plus tard, en juin, des propositions pour la période 2014-2020.
Le commissaire en charge du Budget, le Polonais Janusz Lewandowski, a sondé le terrain. Il a proposé une économie de 40 milliards d'euros sur les contributions nationales, mais en contrepartie, il demande des économies et de nouvelles recettes.
Une tournée des capitales lui a permis de prendre la mesure des difficultés.
Paris refuse de toucher aux dépenses agricoles (40% du budget). La Pologne s'oppose à toute coupe dans les fonds de cohésion destinés à aider les régions les plus défavorisées (40%). Londres oppose son veto à tout impôt européen et défendra bec et ongle son "rabais" de 6 milliards d'euros.
"On se retrouve avec un Rubik Cube, et on ne trouve pas la solution", constate l'entourage de M. Lewandowski.
La bataille est engagée et les Britanniques ont tiré les premiers. La presse est partie à la charge contre la mauvaise gestion et les détournements de l'argent de la cohésion et contre les frais de mission déraisonnés des élus européens.
Membre de la coalition au pouvoir, l'eurodéputé libéral Edward McMillan-Scott est pour sa part parti en croisade contre le "double siège" du Parlement européen, qui impose chaque mois une transhumance entre Bruxelles et Strasbourg dont le coût est chiffré à 180 millions d'euros par an.
La Commission a senti la menace de ces critiques auprès de l'opinion publique européenne. Janusz Lewandowski a donc appelé les institutions à réduire leurs dépenses de fonctionnement pour adresser ainsi "un signal positif" aux citoyens européens.
La démarche a toutefois une portée très limitée. L'exécutif bruxellois veut en effet limiter "à moins de 1% l'augmentation de ses dépenses de fonctionnement" dans le budget 2012 par des "coupes pour les frais de mission, les réunions, les conférences, les études et les publications".
Les coûts administratifs de l'UE seront de 8,3 milliards d'euros en 2011, soit 5,7% du budget total de l'UE qui s'élève à 126,5 milliards d'euros.
"C'est le seul poste sur lequel la Commission peut agir", confessent ses porte-parole.
Les traitements représentent la moitié de ces coûts, mais pas question de "faire un geste" en signe de solidarité, comme l'avait suggéré il y a quelques mois le Français Joseph Daul, chef du groupe conservateur au Parlement européen.
Le budget européen représente 1,04% du revenu national brut de l'UE et coûte 246 euros par citoyen et par an, ou 67 centimes d'euro par jour.
David Cameron veut le ramener à moins de 1% ou, tout au moins, caler sa progression sur l'inflation dès 2012.
Le budget 2012 "sera une bataille cruciale", car il déterminera la marge de manoeuvre jusqu'en 2020. La Commission va tenter de le maintenir à 1% du PIB européen, mais elle s'attend à voir ses propositions "crucifiées".
"La bataille va être sanglante et elle va faire des victimes", prédit un de ses responsables.