Nicolas Sarkozy et Angela Merkel se sont efforcés d'afficher leur entente lundi dans la crise financière, en particulier sur le maintien de la Grèce dans l'euro, malgré des désaccords persistants sur les modalités d'introduction d'une taxe sur les transactions financières.
Le président français, qui devrait briguer sa réélection lors de l'élection présidentielle française dans trois mois et demi, reste déterminé à forcer l'allure pour prélever cette taxe sur les transactions financières internationales, dite taxe Tobin, tandis que la chancelière allemande est attachée à la recherche d'un compromis en Europe.
"Ma conviction, c'est que si nous ne montrons pas l'exemple, ça ne se fera pas", a indiqué M. Sarkozy lors d'une conférence de presse avec Mme Merkel.
Celle-ci a poliment jugé que l'annonce française était "une bonne initiative", mais a répété que "côté allemand, le but (était) d'avoir une déclaration d'intention des ministres des Finances (de l'Union européenne) d'ici début mars".
L'objectif est plus qu'optimiste, en raison de l'opposition farouche de la Grande-Bretagne qui souhaite préserver les intérêts de la place financière de Londres.
Mme Merkel a ajouté que "personnellement", elle pouvait "imaginer une telle taxe au niveau de la zone euro" seule, tout en précisant que cette option n'était pas soutenue par l'ensemble de son gouvernement.
Le parti conservateur CDU d'Angela Merkel est associé pour gouverner à la petite formation bavaroise CSU et au parti libéral en pleine débâcle FDP, qui tous deux craignent une désertion de la place financière de Francfort au profit de la City de Londres.
Pour le reste, le couple "Merkozy" a affiché son accord sur la marche à suivre pour tenter d'endiguer une crise de la zone euro toujours plus aigue, malgré une divergence de ton lorsqu'il s'agit de hiérarchiser efforts de discipline et efforts de croissance.
Relancer l'emploi et la croissance est "la priorité" selon M. Sarkozy, tandis que Mme Merkel préfère parler plus prudemment de "deuxième pilier", au côté de la discipline budgétaire chère à son pays.
Les deux dirigeants ont évoqué en termes vagues des initiatives pour l'emploi, inspirées de réformes menées dans certains pays et qui seront déterminées à l'issue d'une "étude" comparative.
La France et l'Allemagne souhaitent que l'accord européen renforçant la discipline budgétaire, sur lequel 26 des 27 pays de l'UE se sont engagés début décembre, soit signé "pour le 1er mars" a déclaré le président français.
"L'urgence réside moins dans la nécessité de se doter de nouvelles règles, que dans la volonté de convaincre les marchés de l'unité et de la conviction" des Européens, a analysé Christian Schulz, économiste de la Berenberg Bank.
Les deux dirigeants sont par ailleurs d'accord pour réfléchir aux moyens "d'accélérer le versement du capital" du futur mécanisme de secours européen (MES), qui doit être opérationnel dès cette année, face à une situation qualifiée par le président français de "très tendue".
La zone euro est écartelée, avec d'un côté les pays "périphériques", déjà sous perfusion comme la Grèce ou objet de toutes les inquiétudes comme l'Italie, et de l'autre les pays réputés stables et vertueux comme l'Allemagne.
Berlin a pour la première fois de son histoire émis lundi un emprunt à taux négatif: les investisseurs sont prêts à perdre de l'argent pourvu qu'ils puissent le placer dans les coffres allemands jugés plus sûrs.
Mme Merkel et M. Sarkozy ont aussi réitéré leur volonté de maintenir la Grèce dans la zone euro, à condition que le pays mette en oeuvre les réformes promises.
La chancelière a jugé "nécessaire" une restructuration de la dette grecque, qui doit lui permettre d'effacer 50% de son ardoise auprès des créanciers privés, mais a tenu à rassurer les marchés en affirmant que cette procédure resterait "une exception".
Selon la presse allemande, le Fonds monétaire international, l'un des bailleurs du pays, doute de plus en plus de la capacité d'Athènes à redresser la situation malgré cette restructuration et l'aide internationale qui afflue depuis mai 2010.
Sa directrice générale Christine Lagarde est attendue mardi à Berlin.