Fitch Ratings, la moins américaine des trois grandes agences d'évaluation financière, a confirmé mardi que les Etats-Unis restaient à ses yeux éminemment solvables en maintenant la note de leur dette publique à "AAA", la meilleure possible.
L'agence a pris le contre-pied de sa concurrente Standard & Poor's, qui avait abaissé la note du pays d'un cran au début du mois, provoquant un séisme sur les marchés financiers. Alors que S&P envisage un nouvel abaissement de la note américaine, Fitch ne prévoit pas de la modifier à moyen terme.
Pour Fitch, "les piliers fondamentaux de l'exceptionnelle solvabilité des Etats-Unis demeurent intacts: leur rôle pivot dans le système financier mondial et une économie flexible, diversifiée et riche".
La première économie mondiale, estime-t-elle, est capable de s'adapter aux chocs grâce à la flexibilité de sa politique monétaire et de ses taux de change, et sa croissance, pour l'instant très faible, devrait retrouver du rythme.
Notant la récente détérioration de la situation budgétaire des Etats-Unis, l'agence souligne qu'elle pourrait être amenée à envisager d'abaisser leur note si le comité parlementaire bipartite, dont les conclusions sont attendues pour la fin novembre, n'arrive pas à se mettre d'accord sur un plan crédible de réduction de la dette publique.
Le pays risquerait alors de perdre dans les deux ans son précieux talisman, qui lui permet de bénéficier de conditions de financement très avantageuses sur les marchés.
L'absence d'accord au Congrès pourrait aussi conduire à un abaissement pur et simple de la note de Washington, mais ce scénario est "moins probable", note Fitch.
Standard & Poor's avait abaissé le 5 août, la note des Etats-Unis, leur accordant un "AA+" signifiant qu'ils restent un émetteur de qualité dont la capacité à rembourser ses dettes est à l'abri des changements de conjoncture.
S&P avait justifié cette décision par la présence de "risques" que le pays prenne des mesures insuffisantes contre son déficit budgétaire. Pour elle, le débat politique n'est pas à la hauteur des problèmes causés par une dette publique de plus de 14.500 milliards de dollars.
Le Trésor américain, qui avait accusé S&P de grossières erreurs de calcul, a réagi à l'annonce de Fitch en affirmant valoir "AAA" mais a exhorté le Congrès à prendre "des mesures supplémentaires pour s'attaquer aux défis que pose [la] situation budgétaire" du pays à long terme.
Dotée d'un siège à New York et d'un autre à Londres, Fitch Ratings est une filiale de Fimalac, société de participation de l'homme d'affaires français Marc Ladreit de Lacharrière.
La troisième grande agence de notation, Moody's, a confirmé le 7 août le "triple A" qu'elle accorde aux Etats-Unis, et a indiqué qu'elle n'excluait pas de leur retirer, mais pas dans l'immédiat.
Surgissant dans un environnement d'inquiétudes sur la viabilité de la croissance économique aux Etats-Unis et en Europe et les problèmes liés à la dette de certains pays du Vieux Continent, la décision de S&P a ébranlé pendant plusieurs jours les Bourses mondiales.
Paradoxalement, cette tempête financière a confirmé le statut spécial dont jouissent les Etats-Unis puisque les investisseurs tourmentés sont venus en nombre chercher refuge dans les obligations du Trésor américain.
"Les émissions de l'Etat fédéral américain, qu'il s'agisse du dollar ou des bons du Trésor, restent la référence mondiale et, en conséquence, le pays bénéficie d'une flexibilité financière hors pair et d'une tolérance accrue vis-à-vis de a dette", estime Fitch.
Selon elle, le ratio de la dette publique des Etats-Unis à leur PIB, qui avoisine 100%, se stabilisera à 105% entre 2016 et 2020, soit "plus haut que pour tout autre Etat actuellement noté 'AAA'".
L'agence prévient que c'est la limite maximale permettant au pays de conserver cette note.