PARIS (Reuters) - Eurostat estime que les 2,5 milliards d'euros apportés par l'Etat français à Orano, le groupe qui a succédé à Areva (PA:AREVA), auraient dû être comptabilisés dans le déficit public 2017 de la France, qui pourrait alors s'en trouver rehaussé de l'ordre de 0,1 point de PIB à 2,7%, annonce lundi l'Insee.
Dans un communiqué, l'institut déclaré prendre acte des réserves exprimées par son homologue européen à propos des comptes des administrations publiques françaises publiés fin mars, soulignant qu'elles "portent sur des choix méthodologiques et ne remettent pas en cause les évaluations quantitatives faites par la statistique publique".
Elles portent pour l'essentiel sur la restructuration du groupe nucléaire Areva, dans lequel l'Etat français a injecté au total 4,8 milliards d'euros en 2017, dont 2,3 milliards, liés à l'ancienne holding Areva SA, ont été comptabilisés en dépense publique par l'Insee, et 2,5 milliards dans Orano.
L'Insee a considéré que ce dernier investissement direct de l’État dans Orano "s’est fait conjointement et dans les mêmes conditions" que des investisseurs privés, qui ont apporté 500 millions d'euros et qu'il pouvait de ce fait ne pas être assimilé à une dépense publique.
Il se fonde pour cela sur "les préconisations des textes méthodologiques régissant l’établissement du compte des administrations publiques, à savoir le Système européen de comptes (SEC 2010) et l’édition 2016 du Manuel du déficit et de la dette publics".
Mais Eurostat ne partage pas cette analyse "et estime que cette somme aurait dû être comptabilisée en dépense, augmentant d’autant le déficit", ajoute l'Insee.
En conséquence, "des discussions devraient se poursuivre au cours des prochains mois avec Eurostat pour tenter de résoudre cette divergence d’ordre méthodologique".
Selon Etienne Debauche, chef de la division Synthèse générale des comptes de l'Insee, elles devraient se tenir au niveau des groupes de travail qui réunissent au niveau européen Eurostat, les instituts de statistiques nationaux mais aussi les banques centrales.
L'objectif est de parvenir à un consensus d'ici octobre, date de la prochaine notification des comptes publics à Eurostat, a-t-il dit à Reuters.
DES RÉSERVES AUSSI SUR L'AFD
En attendant, comptabiliser la totalité de la participation de l’État à la recapitalisation d’Orano en dépense publique "ne rehausserait le déficit notifié pour l’année 2017 que de 0,1 point de PIB, à 2,7% du PIB" et ne remettrait donc pas en cause l'objectif de le ramener sous 3,0%. Et la dette notifiée ne serait pas modifiée, indique l'Insee.
Toujours selon l'Institut, Eurostat a exprimé une autre réserve sur les comptes publics de la France, déjà soulevée cette fois, qui tient au statut de l'Agence française de développement (AFD), le bras financier de la France à l'aide au développement, qui n'est pas classé en administration publique par l'Insee.
"Eurostat considère en effet qu’au regard de sa gouvernance, l’AFD devrait être classée en administration publique dans la mesure où le conseil d’administration de l’AFD est composé majoritairement de représentants des administrations publiques."
L'Insee dit qu'il analysera "dans les mois qui viennent plus en détail la gouvernance de l’AFD et le rôle de l'État dans les prises de décision du conseil d'administration."
Toujours à la demande d'Eurostat, l'Insee a accepté que les prêts à condition avantageuse accordés par l'Etat français à l'AFD comme Ressource à condition spéciale (RCS) en fonds propres, soient requalifiés en transfert en capital avec incidence sur le déficit public et ce depuis la création de l'AFD en 1998.
"Ce nouveau traitement a un impact très limité sur le déficit public - 75 millions d’euros par an en moyenne sur les 10 dernières années, avec un maximum de 215 millions d’euros en 2015", précise l'Insee.
(Yann Le Guernigou, édité par Yes Clarisse)