Les concurrents d'EDF et GDF Suez ont continué à grignoter des parts de marché l'an dernier, mais les opérateurs historiques règnent toujours en maîtres sur la clientèle des particuliers, et le marché de l'électricité reste globalement bien moins concurrentiel que celui du gaz.
Le bilan annuel de l'ouverture à la concurrence des marchés français de l'électricité et du gaz, publié vendredi par le gendarme du secteur, la Commission de régulation de l'énergie (CRE), montre que la concurrence a progressé globalement l'an dernier, mais à pas toujours mesurés.
Depuis le 1er juillet 2007, l'ensemble des consommateurs, y compris les particuliers, peuvent changer librement de fournisseur d'énergie et de type de contrat.
Ils peuvent au choix garder les tarifs réglementés proposés principalement par EDF et GDF Suez, dont l'évolution est encadrée par l'Etat, ou opter pour des contrats dits en offre de marché (c'est-à-dire aux tarifs libres), soit en restant chez EDF ou GDF Suez, soit en passant chez un concurrent comme Direct Energie, Enercoop, Altergaz, Gaz de Paris...
Malgré cette liberté totale qui leur est offerte depuis 4 ans et demi, les particuliers (ou clients dits "résidentiels") restent très majoritairement fidèles aux tarifs réglementés, alors que le secteur des entreprises est beaucoup plus disputé.
Pour l'électricité, les clients résidentiels passés à une offre de marché ont augmenté de 16% l'an dernier selon la CRE, à 1,8 million. Mais les fournisseurs alternatifs ne captent néanmoins que 5,1% des 30,6 millions de clients résidentiels, et 5,9% des volumes de courant consommés.
En ce qui concerne le gaz, le nombre de clients en offre de marché a augmenté de 15% l'an dernier, à 459.000. Cela se traduit par une part de marché de 9,2% pour les alternatifs en nombre de clients, et de 8,8% en termes de volumes.
Selon David Martineau, directeur associé du cabinet SIA Conseil, le manque d'empressement des consommateurs à changer d'offre s'explique notamment par le contexte économique, qui les incite à conserver des tarifs réglementés jugés protecteurs. "Il y a toujours une inquiétude sur l'évolution des prix, et donc une prudence dans un contexte économique peu favorable", explique-t-il.
Par ailleurs, l'Arenh, un dispositif mis en place en juillet qui oblige EDF à revendre une partie de l'électricité produite par son parc nucléaire à ses concurrents à un prix encadré, justement afin de les aider à proposer des offres plus compétitives, n'a pas bouleversé la donne, hormis pour les "électro-intensifs", ces industriels fortement consommateurs d'énergie, qui avaient milité en faveur de ce mécanisme.
"L'Arenh n'a eu un effet que sur les très grands clients, mais n'a pas eu d'impact sur le marché de détail", le rythme de conversion aux offres de marché des clients résidentiels n'ayant pas grimpé par rapport aux trimestres précédents, dit Colette Lewiner, directrice du département énergie chez Capgemini.
Chez les "grands consommateurs d'énergie", la part de marché des fournisseurs alternatifs sur ce segment est passée de 26,6% à 40% en volumes selon la CRE, entre fin mai et décembre 2011.
Cependant, ce dispositif "est un premier pas, c'est un mécanisme qui offre des opportunités satisfaisantes aux grands industriels", et que ceux-ci n'ont pas manqué de saisir, estime M. Martineau.
Enfin, le bilan de la CRE confirme que le marché du gaz est nettement plus concurrentiel que celui de l'électricité. Ainsi au 31 décembre 2011, toutes catégories confondues, 93% des clients en électricité, responsables de 63% de la consommation de courant, bénéficiaient toujours de tarifs réglementés, tandis que pour le gaz, 15% des clients, représentant 59% de la consommation, étaient en offre de marché.