La BCE, strictement opposée à toute restructuration de la dette grecque, a prévenu qu'elle pourrait le cas échéant refuser les obligations grecques comme garanties, agitant la menace d'un tarissement des liquidités pour les banques du pays.
"Une restructuration de la dette souveraine saperait l'éligibilité des obligations d'État grecques" à servir de garanties; en conséquence, "la poursuite de la mise à disponibilité de liquidités serait impossible", a déclaré mercredi à Athènes Jürgen Stark, l'économiste en chef de la Banque centrale européenne. Ces propos ont été confirmés jeudi par l'institution à Francfort (ouest), son siège.
Depuis le déclenchement de la crise financière en 2008, la BCE met à disposition des banques de la zone euro des liquidités. Les banques qui y ont recours doivent en contrepartie fournir des garanties, appelés collatéraux, dont les obligations publiques émises par leur pays et celles dont ils se sont portés acquéreurs.
Si ces obligations souveraines, qui constituent une grosse part des garanties apportées à la BCE, n'étaient plus acceptées, les banques grecques, qui éprouvent les plus grandes difficultés à se refinancer sur le marché inter-bancaire, pourraient se retrouver rapidement à court de liquidités.
"Cela susciterait un besoin immédiat de soutien des banques grecques par un autre moyen", relève Holger Schmieding, économiste de Berenberg Bank.
Pour ses confrères de RBS, agiter ce scénario est "la dernière carte entre les mains de la BCE dans son opposition à une restructuration", même "douce" telle que les Européens l'envisagent à l'heure actuelle.
Mais "la mission de la BCE est de défendre la stabilité financière, ce qui la contraindrait probablement à continuer à soutenir le système (bancaire grec) en acceptant une forme quelconque de collatéraux", poursuivent-ils.
La BCE est fermement opposée à une restructuration de la dette grecque jugée inévitable par les marchés.
L'institution monétaire estime en effet que toute restructuration, loin de sortir la Grèce de l'ornière -ses dettes devraient peser 152% de son PIB fin 2011-, conduirait à l'effondrement du système bancaire et de l'économie grecs, et affecterait par ricochet l'ensemble de la zone euro.
Une restructuration de la dette grecque serait "le meilleur moyen de déclencher une catastrophe", a estimé mercredi M. Stark, qui avait déjà estimé il y a quelques semaines qu'elle sonnerait le début d'une crise financière plus grave que celle générée par l'effondrement de la banque d'affaires Lehman Brothers en 2008.
L'économiste allemand, ancien dirigeant de la Bundesbank, est l'un des plus virulents opposants à une restructuration, et ne perd pas une occasion de le faire savoir.
Mais, notent les analystes de RBS, "la BCE semble être de plus en plus écartée du débat politique autour de la crise de la dette".