Vider son compte en banque ne se fait pas en un clic et les dizaines de milliers d'internautes émules d'Eric Cantona auront du mal à suivre mardi l'appel à la "panique bancaire" inspiré par l'ex-star du football, s'ils n'ont pas pris les devants depuis plusieurs jours.
A la veille du jour J, quelque 38.000 internautes étaient inscrits mardi pour participer au mouvement "Révolution! Le 7 décembre, on va tous retirer notre argent des banques", sur la page dédiée du réseau social Facebook. Environ 30.000 autres affirmaient envisager "peut-être" de s'y joindre.
Dans la longue liste de commentaires et encouragements divers, aucune mention ne figurait en revanche de quelconques préparatifs avant d'effectivement se présenter mardi au guichet.
Pourtant, quasiment aucune des 40.000 agences que compte l'ensemble du réseau bancaire français n'acceptera de délivrer plus de 2.000 euros à un client si celui-ci n'a pas prévenu de sa venue à l'avance, et pour peu que son compte soit crédité de la somme correspondante.
"Beaucoup d'agences sont sans caisse, n'ont pas d'espèces", explique-t-on à la Société Générale.
Les banques françaises ont résolument pris ce virage dans les années 90, incitant les clients à se tourner vers les distributeurs automatiques.
L'initiative a permis de réduire sensiblement les attaques d'agences. Elles sont passées de 974 en 2000 à 135 l'année dernière. Les malfaiteurs se sont, en partie, reportés sur les distributeurs et les transports de fonds, qui sont néanmoins beaucoup mieux sécurisés.
"Aujourd'hui, il n'y a plus de manipulation de monnaie, donc pas d'attaque", souligne-t-on chez LCL.
BNP Paribas et la Banque postale limitent les retraits instantanés de liquide à 1.500 euros. Certaines agences de la Société Générale acceptent de libérer jusqu'à 2.000 euros sur présentation d'un chéquier.
Le montant disponible en caisse dépend par ailleurs de la taille de l'agence, certains guichets en milieu rural se situant en-deçà de ces niveaux.
"Si le retrait est supérieur à 1.500 euros, on propose un rendez-vous dans les 48 heures, ce qui correspond au délai d'approvisionnement", indique-t-on chez BNP Paribas.
Ce décalage est également de deux jours à la Société Générale mais peut aller jusqu'à trois, ailleurs.
Un autre argument pèsera sans doute peu pour les convaincus mais, dans la plupart des cas, les retraits importants sont facturés quelques euros.
Reste l'alternative du distributeur automatique, mais là encore, les possibilités sont limitées.
Les cartes les moins onéreuses ne permettent pas de retirer plus de 300 euros sur une semaine. Quant aux modèles haut de gamme, Visa Premier ou Gold Mastercard, le plafond dépasse rarement 2.000 euros sur la même période.
Quand bien même la totalité des partisans affichés d'Eric Cantona se rendraient mardi dans leur agence sans préavis, ils ne pourraient donc pas retirer plus de quelques dizaines de millions d'euros, soit moins d'un millième des 270 milliards d'euros déposés en France sur des comptes courants.
Co-fondatrice du mouvement, la scénariste belge Géraldine Feuillien n'aura pas ce problème. "Moi, ça fait longtemps que, chaque début de mois, je retire mon argent liquide", a-t-elle expliqué à l'AFP.
Le collectif "Sauvons les riches!" suggère plutôt aux sympathisants de changer de banque et de déplacer l'argent des "plus nuisibles vers les plus recommandables", citant en exemple trois établissements: la Banque postale, le Crédit coopératif (filiale du groupe BPCE) et la Nef, petite banque qui se revendique comme une "coopérative de finances solidaires".