Le ministre de l'Intérieur grec a assuré dimanche que son pays ne rembourserait pas le FMI en juin : des propos nuancés ensuite par le ministre des Finances Yanis Varoufakis, mais qui confirment qu'Athènes juge être allée au bout des concessions à ses créanciers.
"Les remboursements au FMI en juin sont de 1,6 milliard d'euros, ils ne seront pas faits et d'ailleurs il n'y a pas d'argent pour les faire", a déclaré Nikos Voutsis à la chaîne de télévision Mega Channel dimanche matin.
Déjà cette semaine, Nikos Filis, porte-parole du parti de gauche radicale au pouvoir Syriza, avait assuré : "Nous n'avons pas l'argent pour payer le FMI le 5 juin. Il n'y a de l'argent que pour les salaires et les retraites".
Ces propos sont graves, car un défaut de la Grèce à rembourser le FMI, la BCE ou l'UE, qui lui ont prêté ou promis de prêter 240 milliards d'euros depuis 2010, aurait des conséquences incalculables.
Pour leur part, le Premier ministre Alexis Tsipras et l'équipe des ministres en charge des négociations avec les créanciers n'ont jamais annoncé qu'un paiement ne se ferait pas.
Néanmoins, M. Tsipras a prévenu depuis mars que la Grèce ne pourrait pas indéfiniment honorer le remboursement de sa dette, si on ne lui reprête pas un peu d'argent.
-- De l'argent jusqu'à "un certain moment" --
Dimanche sur la BBC, M. Varoufakis est resté vague : jusqu'alors, "nous nous sommes remarquablement débrouillés pour honorer nos dettes. Mais à un certain moment, ce ne sera plus possible".
Selon Mega, dont l'information n'a été ni confirmée ni démentie, M. Tsipras, aurait demandé au secrétaire américain au Trésor Jacob Lew, samedi au cours d'un apel téléphonique, d'appuyer auprès du FMI l'idée de ne rembourser à celui-ci que fin juin les quatre échéances du mois.
La Grèce, qui a déjà eu recours à un fonds d'urgence pour payer les 750 millions d'euros du FMI en mai, doit lui envoyer les 5, 12, 16 et 19 juin, un total de 1,574 milliard d'euros.
Mais aussi payer les fonctionnaires, les retraites, les fonds de sécurité sociale pour environ 2,2 milliards d'euros.
Selon une source proche des questions de dette grecque, il y a suffisamment d'argent pour payer les salaires, les retraites et l'échéance du 5 juin du FMI. Cette source est beaucoup plus évasive pour la suite.
Cela laisserait donc jusqu'au 12 pour trouver un accord.
Mais la Grèce ne veut plus bouger : "Nous avons fait ce que nous avions à faire, c'est maintenant au tour de l'Europe", a dit M. Tsipras samedi devant le comité central de Syriza, ajoutant : la Grèce n'acceptera pas de "demandes irrationnelles" de ses créanciers.
"Nous avons fait les trois-quarts du chemin, les créanciers doivent faire le dernier quart", a renchéri dimanche M. Varoufakis.
M. Tsipras, dont le parti Syriza gouverne en coalition avec le parti souverainiste des Grecs indépendants, n'a que 11 sièges de majorité absolue au Parlement, une marge de manœuvre très faible face à l'aile gauche de son parti, incarnée notamment par MM. Voutsis et Filis, partisane de la confrontation avec les créanciers, s'il le faut.
Une partie de cette mouvance a lancé mardi l'initiative "R Project", comme (révoltez-vous, réclamez, résistez").
Dimanche, devant le comité central de Syriza, le ministre de l'Energie Panayotis Lafazanis, devait déposer une motion prônant ler refus de tout "chantage" supplémentaire des créanciers en refusant de les payer. Il les a décrits dimanche comme "des chiens prêts à l'attaque".
Incarnant l'aile modérée de Syriza, le député européen Dimitris Papadimoulis a appelé dimanche au contraire le parti à accepter "des compromis difficiles" pour éviter un échec "désastreux" des négociations.
Il a sans doute été entendu car à la fin du comité central, une motion appelant à ne pas payer la prochaine échéance du FMI si "les tactiques d'extorsion" se poursuivaient a été rejetée par 95 voix à 75.
Le communiqué final, lançant aux "fanatiques de l'austérité", qui tentent "d'asphyxier la Grèce", qu'ils "jouent avec le feu", et prévenant que le paiement des salaires et des retraites serait une absolue priorité à l'avenir, a cependant été adopté à l'unanimité.