Les pays les plus solides de la zone euro maintiennent fermement leur pression sur la Grèce avant une réunion critique lundi, posant de nouvelles conditions pour accorder leur aide et suggérant même de reporter les élections prévues en avril dans le pays.
Les ministres des Finances de la zone euro doivent se retrouver lundi à Bruxelles pour examiner si les conditions sont réunies pour allouer une aide sans précédent à la Grèce, comprenant une aide publique de 130 milliards d'euros et un effacement partiel de la dette détenue par les créanciers privés, à hauteur de 100 milliards d'euros. Ils doivent au mieux donner un accord de principe sur ces deux points mais rien n'est garanti.
"Nous croyons que nous aurons le feu vert de l'Eurogroupe lundi pour continuer les procédures" visant côté grec à la mise en oeuvre du programme économique exigé par l'UE et le FMI en échange du déblocage de prêts de 130 milliards d'euros et "pour lancer" l'opération d'effacement de 100 milliards de titres détenus par les créanciers privés du pays, a affirmé Pantelis Kapsis, porte-parole du gouvernement grec.
M. Kapsis a confirmé qu'Athènes avait trouvé un accord avec ses bailleurs de fonds sur les moyens de combler un trou de 325 millions d'euros dans le budget 2012. "La question est réglée", a-t-il affirmé.
Selon des médias grecs, ces économies viendront de coupes additionnelles dans les régimes salariaux spéciaux de la fonction publique (police, armée, justice et hopitaux), le budget de défense et les dépenses pharmaceutiques, ainsi que dans certaines retraites spéciales.
"Les conditions posées ont été totalement remplies, nous considérons que nous avançons normalement", a insisté M. Kapsis, rappelant également que comme l'exigeaient l'UE et le FMI, les chefs des deux partis gouvernementaux grecs, le socialiste Georges Papandréou et le conservateur Antonis Samaras, se sont engagés par écrit à mettre en oeuvre la politique économique convenue.
Du côté des créanciers, échaudés par le retard pris selon eux par la Grèce, certains pays craignent de délier une nouvelle fois les cordons de la bourse et de voir les promesses faites par Athènes remises en cause après les élections.
Partisan de cette ligne dure, le ministre néerlandais des Finances Jan Kees de Jager a ainsi évoqué jeudi la possibilité de conclure l'accord sur le nouveau plan d'aide après les élections législatives.
"Idéalement, vous voulez traiter avec des dirigeants dont vous savez qu'ils apporteront leur soutien au paquet d'aide après les élections", a-t-il déclaré jeudi dans un quotidien néerlandais: "c'est pour cela qu'il a été suggéré d'attendre jusqu'après les élections". "On pourra alors négocier cet engagement avec le nouveau gouvernement", a-t-il souligné.
Des propos qui font écho à des déclarations du ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble, également partisan de la méthode forte avec Athènes.
"Nous devons nous poser la question: qui va garantir qu'après les élections" prévues en avril "la Grèce respectera (...) ce que nous décidons actuellement avec la Grèce?", s'est-il interrogé mercredi.
Outre les Pays-Bas et l'Allemagne, la Finlande serait elle aussi rétive à aider une nouvelle fois la Grèce sans garanties supplémentaires. Dans ces trois pays, les députés pourraient avoir à donner leur aval sur le deuxième programme d'aide à la Grèce. En Allemagne, cela devrait avoir lieu le 27 février.
L'idée de reporter les élections fait toutefois du chemin en Grèce, le ministre de l'Economie Michalis Chrissohoïdis s'étant déclaré opposé aux élections anticipées dans son pays et favorable à l'idée de laisser en place le Premier ministre actuel Lucas Papademos jusqu'en 2013.
Pourtant, Athènes a rempli son cahier des charges et a fini par se conformer aux exigences de ses partenaires de la zone euro: "des progrès substantiels ont été réalisés", a d'ailleurs salué mercredi le chef de file de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, après une conférence téléphonique de ce forum.
Les autorités grecques ont trouvé comment économiser 325 millions d'euros dans le budget 2012 et ont donné des assurances aux responsables de l'Union monétaire. Comme exigé, les chefs des deux partis gouvernementaux grecs, le socialiste Georges Papandréou et le conservateur Antonis Samaras, ont envoyé une lettre dans laquelle ils se sont engagés à respecter les objectifs de la politique économique négociée avec l'UE et le FMI.
La zone euro voulait s'assurer par cette lettre de la poursuite des réformes en Grèce après les élections en avril.
Mais pour les pays les plus solides de la zone euro, le compte n'y est toujours pas et de nouveaux engagements doivent être demandés, comme des lettres d'autres chefs de partis grecs notamment.
En outre, Athènes doit se résoudre à accepter une surveillance accrue de ses comptes par l'Union européenne, a rappelé jeudi le ministre luxembourgeois des Finances, Luc Frieden, qui a toutefois réfuté l'idée d'une "mise sous tutelle" du pays.
Les mesures d'assainissement budgétaire devront être mises en oeuvre "dans le cadre d'un partenariat", a dit M. Frieden en demandant à la Grèce de choisir entre réformer son économie ou quitter la zone euro.
La mise en place un compte d'un bloqué réservé au service de la dette grecque fait partie des projets pour renforcer la surveillance budgétaire.
"C'est une grosse partie du travail à faire d'ici lundi: la mise en oeuvre du programme de surveillance. Il y a beaucoup de méfiance car la faiblesse principale des Grecs, c'est la mise en oeuvre des mesures", a indiqué une source gouvernementale européenne.
Les autorités grecques ont également défini avec leurs principaux bailleurs de fonds (réunis au sein de la troïka) une "liste détaillée d'actions préalables" à l'octroi effectif de l'aide, et un calendrier pour la mise en oeuvre de ces mesures a été fixé. "Les mesures doivent être votées d'ici fin février, avant le déboursement", a fait savoir une source européenne.
Autre question à régler: le rapport de la troïka a mis en évidence que le plan de sauvetage pour la Grèce ne permettra pas, en l'état, de ramener la dette publique du pays à 120% du PIB d'ici 2020, comme voulu par le Fonds monétaire international et certains pays de la zone euro.
Après mise en oeuvre du plan, "le niveau de l'endettement a été calculé à 129%. Il faut donc réfléchir aux moyens de compenser", a indiqué une source gouvernementale européenne.