Le Premier ministre grec Alexis Tsipras a maintenu mercredi son appel à dire non aux créanciers de son pays lors du référendum de dimanche, auquel les Européens ont répliqué en excluant toute négociation sur un nouveau plan d'aide d'ici ce vote.
"Ne mettons pas la charrue avant les boeufs", a lancé sur son compte Twitter le ministre slovaque des Finances, Peter Kazimir, après une nouvelle réunion téléphonique des ministres des Finances de la zone euro.
Les ministres sont tombés d'accord pour attendre le résultat du référendum prévu dimanche sur les propositions des créanciers de la Grèce, Union européenne et Fonds monétaire international (FMI), avant de poursuivre les discussions sur un troisième plan d'assistance financière demandé par Athènes, en défaut de paiement vis à vis du FMI depuis mardi soir.
L'Eurogroupe s'est donc aligné sur la position la plus ferme, celle de Berlin, qui refuse toute discussion avant l'annonce du résultat du référendum. Mercredi, la chancelière Angela Merkel a déclaré qu'il n'était pas question de chercher "un compromis à tout prix".
Cette décision a été prise "compte tenu de la situation politique" et de "l'appel des autorités grecques à voter non". "Nous ne voyons pas de base pour poursuivre les discussions à ce stade", a dit le président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem.
- 'On vous fait du chantage' -
Dans ce climat de blocage, M. Tsipras s'est adressé à la nation grecque dans un message télévisé très vindicatif.
"Le non ne signifie pas une rupture avec l'Europe mais le retour à l'Europe des valeurs, le non signifie une forte pression" pour continuer les négociations, a déclaré le Premier ministre grec, qui dirige un gouvernement hostile aux mesures d'austérité réclamées par les créanciers de la Grèce.
"On vous fait du chantage en vous pressant de voter oui à toutes les mesures des institutions, sans aucune solution pour sortir de la crise", a lancé M. Tsipras à l'adresse des électeurs grecs.
En Europe, une victoire du non est largement considérée comme risquant de conduire à la sortie de la Grèce de la zone euro et à une crise majeure des institutions européennes.
Dans la nuit de mardi à mercredi, le gouvernement grec a fait parvenir aux créanciers une lettre dans laquelle il se dit prêt à accepter les réformes exigées d'Athènes, mais en posant de nouvelles conditions et en demandant des aménagements.
La Grèce demande une nouvelle aide financière sur deux ans permettant de couvrir ses besoins, soit environ 30 milliards d'euros, tout en restructurant sa dette.
Le ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, s'est dit certain qu'un accord pourrait être trouvé rapidement après le référendum. "Lundi, les créanciers auront eu le message du peuple grec. Ils sont prêts à l'accord, mais ils voulaient entendre le peuple", a affirmé le ministre à la télévision publique ERT.
M. Varoufakis a de nouveau plaidé pour le "non" au référendum, qui selon lui donnera plus de poids à la position grecque.
Pour sa part, a-t-il dit, la Grèce "veut lundi matin une discussion substantielle sur une solution viable", c'est-à-dire comprenant des propositions sur la restructuration de la dette et pour la reprise, a déclaré le ministre des Finances. "La Grèce est et va rester dans l'euro", a-t-il insisté.
Le plan d'aide demandé par la Grèce serait son troisième, puisque le deuxième a expiré mardi faute d'accord, en même temps que la Grèce faisait défaut sur un remboursement de 1,5 milliard d'euros au FMI. Elle est ainsi devenue le premier pays industrialisé à faire défaut vis-à-vis de l'institution, qui essuie le plus grand impayé de son histoire.
- Décalage Paris-Berlin -
Le ministre allemand, Wolfgang Schäuble, a appelé Athènes à "clarifier ses positions", estimant qu'il n'y avait à l'heure actuelle aucune "base pour discuter de mesures sérieuses".
Le président français François Hollande a jugé au contraire qu'on ne pouvait davantage "différer" un accord. "Il faut être clair, l'accord, c'est tout de suite !", a-t-il déclaré, ajoutant qu'il ne voulait pas "la dislocation de la zone euro".
Le vice-président de la Commission européenne chargé de l'euro, Valdis Dombrovskis, a estimé qu'il existait "une possibilité de parvenir à un accord avant la prochaine échéance" du 20 juillet, date à laquelle la Grèce doit rembourser 3,5 milliards d'euros à la Banque centrale européenne (BCE).
Désormais, seule la BCE assure la survie financière du pays en soutenant à bout de bras ses banques complètement à sec.
Le Conseil des gouverneurs a décidé mercredi, selon une source bancaire grecque, de maintenir inchangé le plafond de l'aide d'urgence pour les banques hellènes, à court d'argent frais et prises d'assaut par des Grecs inquiets qui veulent retirer leurs économies. La BCE reste "prête à intervenir si et quand cela est nécessaire", a assuré la source.
L'agence d'évaluation financière Moody's a abaissé la note de la dette grecque en déclarant que le référendum ferait peser "un risque supplémentaire" sur les créanciers privés. Elle a relégué la note de la Grèce à "Caa3", à un cran de la catégorie "défaut de paiement imminent".