L'agence de notation Moody's a menacé vendredi d'abaisser à nouveau la note de la dette espagnole, actuellement à "Aa2", pointant encore une fois du doigt la situation financière des régions et sanctionnant d'ores et déjà six d'entre elles.
Après avoir dégradé la note de l'Espagne le 10 mars, l'agence a annoncé qu'elle pourrait encore lui enlever un cran.
Si elle le faisait, au cours de sa période d'examen de trois mois, le pays se maintiendrait toutefois dans la catégorie d'emprunteurs de niveau élevé, selon la classification de Moody's.
La Bourse de Madrid a réagi par une baisse, perdant 1,42% à 08H00 GMT, tandis que les taux espagnols à dix ans repassaient au-dessus des 6%, un coût de financement astronomique pour le pays.
Ainsi, l'Espagne a eu beau mener plusieurs plans d'austérité pour réduire son déficit et des réformes pour moderniser son marché du travail, son système de retraite et son secteur bancaire: pour l'agence de notation, elle garde "une vulnérabilité croissante à la tension du marché".
Cette fragilité s'est d'ailleurs fait sentir ces dernières semaines autour du plan de sauvetage de la Grèce, qui a fait tanguer la Bourse madrilène et grimper les taux obligataires espagnols à des records historiques.
Le pays est dans la ligne de mire des marchés depuis plus d'un an déjà, Fitch et Standard & Poor's ayant dégradé sa note en avril et mai 2010.
Moody's avance deux raisons pour sa décision de vendredi.
La première, "les pressions continuelles pour se financer auxquelles fait face le gouvernement espagnol", des pressions qui pourraient "s'exacerber" à la faveur de l'accord européen d'aide à la Grèce.
Ce dernier a "créé un précédent" en impliquant le secteur privé et marqué un accroissement du risque pour les investisseurs détenteurs d'obligations de pays fragiles de la zone euro, estime l'agence, qui a aussi menacé en juin de dégrader la note de l'Italie pour "des inquiétudes similaires".
Deuxième argument de Moody's, la difficulté de l'Espagne à réduire son déficit du fait d'un "environnement de faible croissance" et de "l'écart budgétaire qui persiste chez de nombreux gouvernements régionaux".
L'économie espagnole peine à sortir de la crise, avec une croissance presque atone au premier trimestre (0,3%) et un chômage endémique, qui touchait 20,89% de la population au deuxième trimestre, un record parmi les pays industrialisés.
En outre, les agences de notation, les analystes, mais aussi le Fonds monétaire international (FMI) font part depuis des mois de leurs inquiétudes face à la situation financière des 17 régions espagnoles, très endettées (121 milliards d'euros en cumulé), jouissant d'une forte autonomie financière et jusque-là peu enclines à réduire leur déficit.
Sans surprise, Moody's a donc décidé vendredi d'abaisser d'un cran les notes de six régions, dont l'une des plus puissantes, la Catalogne, en raison de "la détérioration de leur situation budgétaire et de leur dette".
Les cinq autres régions sanctionnées sont la Castille-la Manche, la communauté autonome de Murcie, la région de Valence, l'Andalousie et la Castille et Léon.
Moody's "prévoit que les gouvernements régionaux vont rater leur objectif collectif de déficit, avec une différence de jusqu'à 0,75% du PIB, ce qui rendrait plus difficile d'atteindre l'objectif général de déficit du gouvernement (6% du PIB en 2011)".
Jusque récemment, les finances régionales étaient peu contrôlées par l'Etat espagnol, qui a introduit un premier élément de suivi, en leur fixant des objectifs de réduction de déficit.
Mais en 2010, ce dernier a grimpé à 2,83% du PIB, dépassant largement l'engagement officiel de 2,4%. Au premier trimestre 2011, seule la moitié des régions présentaient un déficit conforme à l'objectif, selon le ministère de l'Economie.
Ce dernier affiche sa fermeté et leur a fixé des buts ambitieux pour les années à venir: 1,3% en 2011 et 2012, 1,1% en 2013 puis 1% en 2014.