La Banque centrale européenne (BCE) a maintenu jeudi son principal taux d'intérêt à 1%, sans surprise pour les économistes qui ont noté le ton moins alarmiste adopté par son président sur le thème de l'inflation en zone euro.
Alors que la hausse des prix a atteint 2,4% en janvier, après 2,2% en décembre, Jean-Claude Trichet a prédit qu'elle allait "probablement rester au-dessus de 2% la plus grande partie de 2011" mais qu'elle redescendrait "vers la fin de l'année". A moyen terme, elle restera contenue sous la barre des 2%, le seuil de tolérance de la BCE.
Or "ce qui compte, ce n'est pas l'inflation immédiate mais le moyen terme", a déclaré M Trichet lors d'une conférence de presse à l'issue du conseil des gouverneurs de l'institution monétaire à Francfort (ouest).
Depuis sa dernière réunion mi-janvier, au cours de laquelle M. Trichet avait laissé entendre que l'inflation redevenait la préoccupation numéro un de la BCE, les investisseurs spéculaient sur une hausse prochaine des taux.
La décision de les maintenir à un niveau historiquement bas, pour continuer à soutenir les banques de la région confrontées à un marché financier qui n'a toujours pas retrouvé un fonctionnement normal, a été prise à l'unanimité, a souligné M. Trichet.
"La tonalité générale du communiqué de la BCE et des commentaires de M. Trichet soutient l'appréciation que la BCE ne va pas relever ses taux avant le quatrième trimestre 2011", commentait Howard Archer, de Global Insight.
Le ton adopté jeudi témoigne du souci de M. Trichet de "ne pas envoyer de nouveaux signes de durcissement", estimait son confrère d'ING Carsten Brzeski, qui n'attend pas de mouvement "imminent" de la BCE parce qu'elle a "les mains encore liées".
Selon lui, trois conditions sont nécessaires pour lui permettre d'augmenter ses taux et de retrouver son rôle premier de gardien de la stabilité des prix: que les dirigeants européens finalisent leur plan d'aide aux pays en difficulté de la zone euro, que les salaires progressent fortement en Allemagne et que les banques européennes réussissent les nouveaux tests de résistance au programme.
Le premier semestre 2011 devrait apporter les réponses sur ces trois points.
Les dirigeants européens se réunissent vendredi à Bruxelles pour tenter d'avancer dans leur projet de renforcement du Fonds de soutien à la zone euro (FESF), qui ne devrait toutefois pas être concrétisé avant fin mars.
Il s'agit d'augmenter la capacité de prêt du dispositif à 440 milliards d'euros, mais aussi d'élargir sa palette d'outils en l'autorisant par exemple à racheter de la dette publique des pays en difficulté, une évolution que la BCE, qui pour l'instant s'acquitte seule de cette tâche, réclame depuis des semaines.
M. Trichet a dit jeudi que ce programme se poursuivait, même si la BCE n'était pas intervenue sur le marché obligataire dernièrement. Interrogé sur la possibilité de revendre ces titres aux pays émetteurs, il n'a pas voulu commenter.
Alors que la BCE doit délivrer ses nouvelles prévisions de croissance le mois prochain, M. Trichet s'est montré prudent, jugeant que la dynamoqie restait positive mais qu'il fallait prendre garde aux ajustements qui allaient intervenir dans de nombreux secteurs.
Dans une note diffusée avant la réunion, John Higgins de Capital Economics, prédisait que "la croissance en zone euro (n'allait) pas tarder à ralentir" en raison des politiques de restriction budgétaire des uns et des autres, jugeant un éventuel resserrement de la politique monétaire de mauvais aloi.