CONAKRY (Reuters) - Le personnel de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) qui lutte contre l'épidémie de fièvre Ebola en Afrique de l'Ouest a des preuves que le nombre de décès et de cas répertoriés sous-estime de beaucoup l'ampleur de l'épidémie, annonce l'OMS sur son site internet.
Selon le dernier bilan officiel, l'épidémie a fait 1.069 morts sur 1.975 cas confirmés et probables, indique l'OMS. La majorité des cas ont été enregistrés en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia. Il y a eu en outre quatre morts au Nigeria.
"Le personnel sur les sites de l'épidémie voit des preuves que le nombre de cas et de décès signalés sous-estiment de façon très importante l'ampleur de l'épidémie", indique l'OMS.
L'organisation basée à Genève dit être en train de coordonner "une augmentation massive de la réponse internationale" en sollicitant les pays, les organismes de contrôle de maladie, et les agences onusiennes.
Dernière mesure en date prise par les pays touchés, l'état d'urgence sanitaire a été décrété jeudi en Guinée, où la fièvre Ebola a fait 377 morts depuis le début de l'épidémie en mars. Du personnel sanitaire est en outre envoyé aux endroits des frontières où l'épidémie est repérée.
SIX MOIS POUR STOPPER L'ÉPIDÉMIE, SELON MSF
Conakry assure qu'elle est sous contrôle au niveau national et fait état d'une baisse des nouveaux cas, mais juge que ces mesures supplémentaires sont nécessaires pour éviter de nouvelles contaminations en provenance des pays voisins.
"Des camions transportant du matériel et du personnel médical se dirigent vers tous les postes frontières avec le Liberia et la Sierra Leone", a annoncé mercredi soir Aboubacar Sidiki Diakité, Inspecteur général de la santé et président de la cellule de crise guinéenne.
Près de 3.000 personnes attendent, selon lui, l'autorisation d'entrer sur le territoire national aux 17 postes de douanes concernés.
"Ceux qui sont malades seront immédiatement isolés. Les gens seront suivis. Nous ne pouvons pas prendre le risque de laisser entrer quelqu'un sans vérifications", a-t-il souligné.
L'état d'urgence sanitaire avait déjà été décrété en Sierra Leone, au Liberia et au Nigeria, bien que ce dernier pays soit pour l'instant peu touché.
Les conséquences économiques de l'épidémie commencent à se faire sentir. La Côte d'Ivoire a ainsi annoncé qu'elle n'autoriserait pas les bateaux en provenance de Guinée, de Sierra Leone et du Liberia à entrer dans son port à Abidjan.
De son côté, Médecins sans frontières (MSF) estime qu'il faudra environ six mois pour contenir cette épidémie qui rappelle une situation de "guerre" en Afrique de l'Ouest et nécessite une présence plus affirmée de la part de l'OMS.
"Si nous ne stabilisons pas le Liberia, nous ne stabiliserons jamais la région", a déclaré Joanne Liu, présidente internationale de MSF, lors d'une conférence de presse à Genève après un déplacement de dix jours dans la région frappée par l'épidémie.
"Au cours des six prochains mois, nous devrions prendre le dessus sur l'épidémie, c'est mon sentiment", a-t-elle ajouté, précisant que la situation nécessitait plus d'experts sur le terrain.
(Avec Matthew Mpoke Bigg et Stephanie Nebehay à Genève; Jean-Philippe Lefief, Danielle Rouquié et Agathe Machecourt pour le service français)