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Macron rend hommage à Piketty à Bercy et critique le modèle français

Publié le 23/01/2015 17:36
Le ministre de l'Economie Emmanuel Macron (c) visite une usine de volailles à Châteaulin (ouest de la France) (Photo Fred Tanneau. AFP)
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Le ministre de l'Economie Emmanuel Macron (c) visite une usine de volailles à Châteaulin (ouest de la France) (Photo Fred Tanneau. AFP)

A l'occasion de retrouvailles à Bercy entre le gouvernement et l'économiste star Thomas Piketty, le ministre de l'Economie Emmanuel Macron a dressé un tableau très sévère d'un modèle français en "échec" face aux inégalités.

Auteur d'un livre au succès mondial, "Le Capital au XXe siècle", M. Piketty qui défend une taxation internationale du capital, affirme avoir accepté de longue date l'invitation à ce colloque intitulé "Quelles politiques publiques pour quelles inégalités au XXIe siècle" organisé par la direction du Trésor, l'une des divisions les plus prestigieuses du ministère.

A Bercy, on ne cachait d'ailleurs pas une certaine fierté à accueillir celui qui a été reçu à la Maison Blanche et qui court les conférences dans le monde entier: "Il a dit +oui+ tout de suite (mais) l'avoir une heure c'est toute une aventure", expliquent les organisateurs.

Trois semaines après son refus tonitruant de la Légion d'honneur que souhaitait lui remettre le gouvernement, le passage au ministère de Thomas Piketty a néanmoins été salué par Emmanuel Macron qui ne s'est pas privé de puiser dans les thèses de l'économiste dans un long discours introductif.

Une tentative d'allégeance balayée d'un revers de la main par le principal intéressé, en marge de l'événement. Pour lui en effet, la priorité économique du jour est de lutter contre le chômage de masse en mettant fin à l'austérité budgétaire en Europe.

"Il est temps que la France, le gouvernement français reconnaisse son erreur de 2012 (...), il y a un moment, au milieu du quinquennat où il est temps de dire qu'on a fait des erreurs et ça je n'ai rien entendu de (tout) ça dans le discours de ce matin", a déclaré celui qui avait été en 2012 l'artisan de la grande réforme fiscale promise par le président François Hollande et abandonnée depuis.

En partance pour la Bretagne où il devait aller sur les sites des entreprises en difficulté Gad et Doux, M. Macron s'est échappé immédiatement après son discours, sans écouter l'exposé de l'économiste star. Ni même prendre le temps d'aller lui serrer la main dans la salle. Aucune rencontre entre les deux hommes n'était prévue dans l'immédiat.

L'approche collective est un "frein"

Les inégalités de patrimoine, "face à elles, nous sommes en échec, c'est la cruauté des constats de long terme que Thomas Piketty a établi, il faut bien le constater", a déclaré M. Macron, dans son discours. Il a rappelé que, comme les inégalités de revenus, elles étaient également des freins à la croissance et à l'innovation.

La lutte contre les inégalités de patrimoine est "un sujet fondamentalement fiscal, un sujet de correction, un sujet de coordination européenne et mondiale à avoir", a-t-il poursuivi.

Mais "les inégalités de destin", comme il les a nommées, sont elles le produit d'un système français, selon lui "beaucoup plus généreux que d'autres économies", et qui, reposant sur "un modèle de redistribution, de protection sociale forte", a du même coup "construit ses propres rigidités".

"Un système à deux vitesses s'est progressivement mis en place en quelque sorte sécrété par les meilleures intentions du monde car, en voulant surprotéger, nous avons créé des +insiders+ de la protection" et donc de nombreux "outsiders", exclus du marché de l'emploi ou du logement, a poursuivi M. Macron.

Fustigeant le "toujours plus" d'argent public il a estimé que "l'approche collective" qui prévaut depuis l'après-guerre en France "a été un frein". Il a appelé de ses voeux "des systèmes beaucoup plus contemporains individualisant ces protections".

"Conscient" d'apporter "peu de solutions", le ministre a finalement évoqué la loi pour la croissance qu'il défend actuellement au Parlement et qui, selon lui, lutte contre ces rigidités en permettant par exemple aux diplômés du notariat de s'installer librement ou aux personnes défavorisées de prendre des autocars pour se déplacer.

Un choix qui faisait sourire M. Piketty à la sortie du colloque: "la libéralisation des autocars, c'est sans doute très utile mais franchement, ce n'est pas à la hauteur des besoins". "Quand on a un quart des jeunes au chômage...Ils ne vont pas tous devenir conducteurs d'autocar !", a-t-il ironisé.

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