L'Union européenne et le nouveau gouvernement britannique de David Cameron ont connu mardi leur première épreuve, avec l'adoption par les pays européens d'un projet de régulation des fonds spéculatifs qui inquiète le Royaume-Uni, soucieux de protéger la City.
Les ministres des Finances de l'UE, réunis à Bruxelles, ont conclu un accord sur un texte visant à mieux encadrer les "hedge funds", et ce malgré les réticences des Britanniques, qui ont longtemps bloqué ce dossier.
Les ministres "se sont mis d'accord" sur une position pour "entamer des négociations avec le Parlement européen" --qui a aussi son mot à dire sur le sujet-- en vue d'un compromis, ont-ils indiqué.
C'est un "chantier" qu'il "faut terminer maintenant", a estimé le commissaire européen chargé des services financiers, Michel Barnier, jugeant "nécessaire" d'"aboutir avant l'été".
Londres, d'où sont gérés quelque 70% des fonds spéculatifs européens, n'a pourtant pas caché ses réticences ces derniers mois sur ce sujet.
Le précédent gouvernement du travailliste Gordon Brown avait obtenu en mars un report, pour éviter que cela lui nuise pendant la campagne des législatives britanniques. Et la nouvelle coalition au pouvoir, dirigée par le conservateur David Cameron, a hérité de ce sujet sensible à peine installée.
"De toute évidence, je suis arrivé avec une position difficile léguée par le précédent gouvernement", a regretté le nouveau ministre britannique des Finances, George Osborne.
Le projet doit réguler les fonds dits "alternatifs": les fameux fonds spéculatifs ("hedge funds"), mais aussi ceux de capital-risque ou d'investissement.
A la lumière de la crise financière, qu'ils sont accusés d'avoir amplifiée, l'Union européenne a entrepris de réguler pour la première fois leur activité.
Peu transparents, ils gèrent quelque 2.000 milliards d'euros dans le monde et sont accusés d'encourager la spéculation via des prises de risque importantes pour obtenir les rendements les plus élevés possibles.
Le débat portait surtout sur le traitement des fonds basés dans des pays en dehors de l'UE.
Selon la position adoptée, en échange d'une plus grande transparence, les fonds installés hors d'Europe mais disposant d'un gestionnaire européen --ce qui est le cas de la plupart de ceux basés à la City de Londres-- disposeraient de règles allégées, mais pas de laissez-passer global.
Les ministres ne voulaient pas leur donner un "passeport" leur permettant d'exercer dans n'importe quel pays européen à partir du moment où ils ont été autorisés dans l'un d'eux, contrairement à ce que demandait la Grande-Bretagne.
Actuellement, les fonds basés hors de l'UE doivent demander dans chaque pays une autorisation à l'autorité nationale de régulation.
Le dernier mot n'est pourtant pas encore dit. Car le Parlement européen défend une position plus proche des thèses britanniques.
Lundi soir, une commission clé du Parlement a approuvé en parallèle un texte moins restrictif. Il plaide pour un système où tous les gestionnaires de hedge funds pourraient obtenir un "passeport".
"Un bon accord pour nous sera un accord qui tient largement compte de la position du Parlement", a prévenu le rapporteur du texte au Parlement, Jean-Paul Gauzès.
Du coup, malgré l'adoption du texte par les ministres, le nouveau gouvernement britannique espère pouvoir compter sur les eurodéputés dans les tractations qui vont s'ouvrir.
"Il y a encore beaucoup de marge de manoeuvre", a jugé M. Osborne.
Les Britanniques ont d'ailleurs obtenu l'engagement que les "préoccupations exprimées par certains Etats membres" soient "prises en compte" dans les négociations.