D'Ubisoft à "Produit en Bretagne", des entrepreneurs bretons veulent peser de tout leur poids en faveur d'un rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne avant l'examen de la réforme territoriale, considérant qu'une région Bretagne dans ses limites historiques créera une dynamique favorable aux affaires.
Alors que se déroule samedi à Nantes une importante manifestation pour cette réunification, Christian Guillemot, l'un des cinq frères fondateurs d'Ubisoft, un groupe numérique -créateur notamment des célèbres jeux video Rayman ou Assassin's Creed- qui emploie 20.000 personnnes dans le monde, dont 3.000 en France, est de ceux qui pensent qu'avec elle "on irait plus vite, plus loin".
"Cela fait 70 ans que la Bretagne subit une partition (ndlr: depuis un décret de Vichy en 1941), ça ressemble beaucoup à un déni de démocratie de la part de l'Etat (...) Avec une Bretagne réunifiée, on aurait 40% de moyens en plus (ndlr: le poids de la Loire-Atlantique) et des hommes qui ont envie de faire des choses ensemble pour leur territoire", assure-t-il à l'AFP .
"Le numérique, ce sera 40% des emplois d'ici cinq ans. Avec une Bretagne à cinq, cohérente avec son histoire millénaire, on a tout pout réussir", considère le chef d'entreprise, soulignant le haut niveau de formation des jeunes Bretons, souvent contraints de partir à l'étranger pour trouver un emploi correspondant à leur qualification.
Christian Guillemot cite l'exemple du Québec qui a su créer en 15 ans une "vraie Silicon Valley". Il considére que la Bretagne à cinq, "par la volonté, peut faire beaucoup" dans ce domaine.
- 'Bête de course' -
"Avec le retour de la Loire-Atlantique en Bretagne, on passe d'un fonctionnement au ralenti (à quatre départements) au niveau d'une bête de course. Une Bretagne à cinq est plus peuplée que huit Etats européens et que 11 des 16 länders allemands. C'est une région taillée pour la course économique", fait valoir Malo Bouëssel du Bourg, directeur de "Produit en Bretagne" (PeB), une association qui regroupe 330 entreprises des cinq départements employant 100.000 salariés.
Il relève aussi que la Bretagne à cinq constitue "la première région agro-alimentaire européenne".
Surtout, insiste-t-il, "la Bretagne bénéficie d'une très forte notoriété à l'international et d'une excellente image" que PeB, dit-il, ne veut surtout pas voir "diluée" dans une région "Grand Ouest" composée de la Bretagne et des Pays de Loire, comme le gouvernement l'avait envisagé. En affaires, poursuit-il, "on a confiance dans les Bretons et c'est un très bon capital".
Aves ses 3.000 km de côtes, cette région pourrait aussi tirer parti économiquement de son environnement maritime, "stratégiquement fondamental pour la Bretagne (...) mais actuellement sous-exploité", considère Malo Bouëssel du Bourg. "20% du commerce mondial passe devant nos côtes", rappelle-t-il.
En terme économique, "la Loire-Atlantique dans la Bretagne, ça a un vrai sens. Ce n'est pas seulement une construction intellectuelle ou affective", assure Carl Guyader, dirigeant de l'entreprise de distribution "Passion Froid" (300 salariés), filiale du groupe Pomona. "On est basé à Nantes mais à Paris, on nous appelle toujours les Bretons. C'est une réalité!"
Pour Malo Bouëssel du Bourg, "le monde économique va se mobiliser beaucoup plus que d'habitude", samedi à Nantes. Pour la première fois, PeB sera présent en tant que tel, derrière une banderole.
Michel Guillemot manifestera "avec (ses) cinq enfants" et " toujours la volonté de créer de la richesse sur le territoire (...) C'est quand même incroyable qu'au moment où on fait une réforme territoriale, on ne nous écoute pas. Mais on ne lâchera pas", affirme-t-il.
L'ancien spationaute Jean-Loup Chrétien, fondateur de Tietronix Optics SAS, basée à Lannion (Côtes d'Armor) sera aussi samedi à Nantes. Il est parti vendredi matin de Houston, où il vit une partie de l'année.