Malgré un carnet de commandes bien rempli, la chocolaterie marseillaise NetCacao, dont les salariés s'étaient déjà mobilisés après l'annonce de la fermeture de leur site par Nestlé en 2004, lutte pour sa survie, faute d'un financement des banques.
En décembre, l'entreprise "est passée tout près de la cessation de paiements", raconte son directeur adjoint Eric Heller. Mercredi, le tribunal de commerce de Marseille lui a accordé un nouveau sursis, jusqu'au 5 février.
Une décision accueillie avec soulagement par les 180 salariés du site de Saint-Menet, installé dans les quartiers est de Marseille.
"Ce n'est pas simplement un report, on reprend les débats, on remet tout sur la table. C'est vrai que c'est difficile pour les salariés qui vivent ça au quotidien, mais c'est une avancée très importante pour nous. Maintenant on est sûr que ce n'est pas fini", a commenté Norbert Sanchez, secrétaire général CGT, sous les applaudissements de ses collègues.
"Un redressement dans une société qui a tout pour réussir, cela aurait été un crime. Cela fait 58 ans qu'on fabrique du chocolat, on est capable d'en fabriquer encore 58 ans minimum!", a-t-il lancé.
Autre signe encourageant, le soutien des pouvoirs publics. Le préfet vient de confier au président de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Marseille "une mission destinée à l'éclairer sur les raisons du blocage de la situation de l'entreprise NetCacao et à faciliter (...) l'émergence d'une solution permettant de sauvegarder l'emploi". Une première analyse doit être rendue "sous une dizaine de jours".
Si "l'inquiétude laisse donc la place à l'espoir", selon la direction, NetCacao n'est pas pour autant sauvée.
"Si nous n'avons pas été placés en redressement judiciaire, c'est parce qu'un investisseur représentant des fonds privés a déposé un engagement et un autre repreneur s'est manifesté. L'apport d'argent neuf par ces nouveaux actionnaires permettrait de combler la trésorerie, mais il faut que les banques nous financent", souligne M. Heller.
Car ce n'est pas par manque de commandes que la chocolaterie se retrouve au bord de la faillite, mais par manque de fonds. "Les banques n'ont pas joué le jeu, elles demandent des garanties trop élevées", déplore le responsable.
Motif de cette réticence? La crise financière bien sûr, mais aussi les différends avec Nestlé, dont NetCacao a repris les activités en 2006 après deux ans de lutte des salariés.
Pourtant, quand l'accord de production avec le groupe suisse prend fin en novembre 2009, la chocolaterie affiche "un carnet de commandes rempli pour les tablettes et des perspectives de commandes en fort développement du côté industriel" pour écouler la poudre et le beurre de cacao. Elle s'est également diversifiée dans les "drops", sortes de palets et de pépites de chocolat.
Mais "qui dit hausse des ventes dit hausse des besoins en fèves, la trésorerie ne suit pas et après c'est la spirale infernale", relate le directeur adjoint qui se dit "usé" après une année 2010 difficile (seulement 9.000 tonnes produites pour un chiffre d'affaires en baisse, à 22 millions d'euros).
Dans l'usine, où l'activité s'est ralentie progressivement, une odeur de cacao flotte encore dans l'air, mais les machines sont quasiment toutes à l'arrêt et les salles de stockage désespérément vides. Quelques employés en blouse blanche déambulent dans les couloirs pour maintenir les installations en état et permettre un redémarrage rapide, au cas où...