Le tribunal de commerce de Marseille a prononcé mercredi la liquidation judiciaire de la chocolaterie NetCacao, qui luttait pour sa survie depuis plusieurs mois en dépit d'un carnet de commandes rempli, une décision qui laisse peu d'espoirs de reprise pour les 182 salariés.
Dans l'usine de Saint-Menet (Est de Marseille) aux allures de bâtiment fantôme, les machines étaient mercredi quasiment toutes à l'arrêt, l'odeur de cacao disparue. Production de la nuit, dix tonnes de tablettes de chocolat blanc, fraîchement conditionnées, attendaient d'être livrées.
Selon la décision dont l'AFP a obtenu copie, NetCacao, placée en redressement judiciaire en février, "a constitué un nouveau passif durant la période d'observation" (environ cinq millions d'euros, selon l'entreprise) et "n'a aucun projet financier permettant de supporter ces dettes".
"L'ensemble des propositions d'investissements n'ont jamais été suivies d'effets concrets", estime la juridiction qui tranche: "l'entreprise n'est plus viable et aucune solution de redressement n'est possible".
Mardi, le tribunal de commerce avait déjà invalidé un montage financier (fiducie) devant permettre à l'entreprise de retrouver une assise face à ses créanciers.
Les salariés, au chômage partiel à 50% depuis début mars, ont manifesté leur colère et déception. Ils ont été reçus en début de matinée par le président du tribunal après avoir pénétré de force dans l'enceinte, a raconté Jean-François Molina, délégué CGT. Celui-ci leur a expliqué que le repreneur potentiel - la société IDD, représentée par Philippe Masson - n'avait pas déposé de dossier de reprise.
"C'est parfaitement odieux et inacceptable. Le tribunal a pris une décision qui est rude et sonne comme un clap de fin mais, en l'absence de tout document, il n'avait pas vraiment d'autre choix", a réagi l'avocat de la société, Me Antoine Raymond.
En assemblée générale mercredi matin, un vote a décidé d'une présence continue sur le site, 24 heures sur 24, week-end compris, de quelques salariés qui assurent la maintenance des installations.
"Malheureusement, on peut légitimement penser qu'il n'y aura pas de solution industrielle pour ce dossier maintenant que la liquidation a été prononcée", regrette Me Raymond qui redoute que le site soit cédé à des promoteurs immobiliers.
La ville de Marseille a dit souhaiter, dans un communiqué, "que l'activité industrielle soit maintenue sur ce site". Le premier adjoint au maire, Roland Blum (UMP), qui a exprimé sa "consternation", a appelé les salariés et les dirigeants de la chocolaterie à ne "pas baisser les bras".
Le président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, Michel Vauzelle (PS), a également fait part de son espoir de reprise "dans des conditions acceptables pour les salariés".
PS et PCF ont eux dénoncé le "manque de soutien de l'Etat", tenu pour "responsable de cette décision insupportable".
L'usine est quasiment à l'arrêt faute de trésorerie et de financement bancaire pour acheter les fèves de cacao nécessaires à l'exécution des commandes, pourtant réelles, de ses clients.
Une grande partie des 182 salariés de la chocolaterie s'étaient déjà mobilisés après l'annonce de la fermeture du site par Nestlé en 2004, finalement repris par NetCacao après 22 mois de conflit social.
"Je suis supporter de l'OM mais quand je vois qu'on donne 270 millions d'euros pour le stade Vélodrome alors que, pour nous, 5 ou 10 millions nous sauveraient ou même deux millions auraient suffi, c'est dur...", souffle M. Molina, même s'il veut "encore y croire".