Rassurée dans l'immédiat par le soutien affiché par ses partenaires européens face à son déraillement financier, la Grèce est désormais dans l'attente du plan de redressement du gouvernement socialiste, qui s'annonce comme un difficile exercice d'équilibre.
Le Premier ministre, Georges Papandréou, doit présenter lundi devant des partenaires sociaux les grandes lignes des mesures "draconiennes" qu'il s'est engagé à prendre. Le détail devrait attendre janvier, quand le pays soumettra à Bruxelles son plan de stabilité sur trois ans.
Dans un entretien publié dimanche, la ministre de l'Economie, Louka Katséli, a toutefois plaidé pour des annonces "immédiates", jugeant que son pays n'avait pas une minute à perdre pour rassurer les marchés.
C'est en proclamant sa détermination à lancer ce redressement que M. Papandréou a réussi au sommet de Bruxelles à se voir accorder un répit, à l'issue d'une semaine d'inquiétudes et de pressions sur la Grèce, sanctionnée par les agences de notation pour l'explosion de sa dette et de son déficit, respectivement de 12,7% et 113,4 du PIB.
Le Premier ministre s'est notamment félicité que ses homologues aient enterré les scénarios sur une éventuelle sortie du pays de la zone euro, agités par plusieurs médias étrangers mais jugés dénués de tout fondement par les analystes en Grèce.
Le ministre des Finances, Georges Papaconstantinou doit poursuivre cette opération de recrédibilisation du pays mardi, via des entretiens avec ses homologues à Bonn et Paris, et mercredi devant des investisseurs institutionnels à Londres.
Avant de quitter Bruxelles, M. Papandréou s'est toutefois employé à rassurer aussi son opinion publique, en vue d'une réunion mardi de tous les chefs des partis politiques, visant à réaliser l'union nationale pour sortir de la crise.
Même si M. Papaconstantinou a déjà évoqué un gel des plus haut salaires dans la fonction publique, et un coup de frein aux embauches, le Premier ministre a exclu toute copie du "modèle irlandais". La bataille ne se jouera pas "contre les salaires" mais contre l'évasion fiscale, l'économie immergée, la "corruption systémique" et la mauvaise gouvernance, a-t-il signifié.
"A titre d'exemple, personne ne sait ici combien touchent vraiment les fonctionnaires, faute de comptabilité centrale, que nous sommes en train de mettre en place, et avec la prolifération de primes en tout genre", a relevé auprès de l'AFP une source du ministère.
Mme Kastéli a également mis en garde dimanche contre toute concession excessive aux diktats financiers: "nous devons savoir que si nous donnons un bras aux marchés, ils voudront aussi nous couper l'autre", a-t-elle affirmé.
Après la Bourse d'Athènes, qui avait clôturé vendredi en baisse de 2,41%, les médias étaient dubitatifs. "Le gouvernement cherche une formule pour faire passer en douceur des mesures dures", écrivait dimanche le quotidien de gauche Elefthérotypia, tandis que le libéral Kathimérini reprochait à M. Papandréou "d'ignorer l'UE et les marchés".
Les conservateurs, au pouvoir jusqu'au 4 octobre, ont pour leur part dénoncé une absence de stratégie cohérente, face à une gauche communiste et radicale accusant le gouvernement de peaufiner des mesures "anti-populaires" sous la "dictée de Bruxelles".
"M. Papandréou doit devenir clair et annoncer des mesures concrètes", juge Angelos Tsakanikas, chef de recherches à la fondation Iobe, think-tank du patronat grec.
"Les marchés en veulent probablement plus" a pour sa part estimé l'économiste Georges Pagoulatos. "Confronté à un équilibre délicat, le gouvernement devrait arriver à tenir le budget 2010", qui prévoit un déficit à 9,1% du PIB, "mais je me demande si l'objectif ne devrait pas être plus ambitieux", a ajouté cet universitaire.