La zone euro a sans surprise approuvé vendredi le plan d'aide à l'Espagne qui prévoit une enveloppe allant jusqu'à 100 milliards d'euros pour recapitaliser ses banques, mais n'a pas réussi à calmer les marchés de plus en plus inquiets de la santé financière du pays.
Signe du climat de tension, la Bourse de Madrid a chuté de 5,82% et les taux d'emprunt de l'Espagne se sont installés vendredi au-dessus de 7%, tout près de leur plus haut niveau historique. De nombreux analystes craignent que le plan d'aide mis sur pied par la zone euro soit déjà insuffisant.
Au cours d'une brève conférence téléphonique, les ministres des Finances de la zone euro ont "à l'unanimité donné leur accord quant à l'aide financière pour recapitaliser les banques espagnoles, a indiqué l'Eurogroupe.
"Fournir un prêt à l'Espagne est nécessaire pour garantir la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble", ont-ils plaidé.
Ce sauvetage est le quatrième depuis le début de la crise de l'euro fin 2009. Il est inédit sur la forme, car il ne concerne que le secteur bancaire, contrairement à l'aide dont ont bénéficié la Grèce, l'Irlande et le Portugal.
Dans le détail, l'aide proviendra du Fonds de soutien de la zone euro (FESF) puis du Mécanisme de stabilité (MES), appelé à lui succéder rapidement.
Les montants précis dont auront besoin les banques seront connus après la publication d'un audit à la rentrée. D'ici là, la zone euro a promis de débloquer 30 milliards fin juillet et de le mettre de côté, en cas d'urgence.
En contrepartie, la zone euro va imposer à l'Espagne des conditions strictes qui se "concentreront" sur le secteur financier. Les banques espagnoles devront notamment présenter des plans de restructuration et mettre à l'écart leurs actifs douteux dans une structure de défaisance, ou "bad bank".
La régulation et la supervision bancaire devront également être renforcées.
Cela passera par de possibles inspections de Bruxelles dans tout établissement financier espagnol, selon le mémorandum qui établit les conditions de l'aide rendu public vendredi. Il doit être signé lundi.
Autre exigence, Madrid doit "respecter ses engagements pour corriger son déficit excessif de manière significative d'ici 2014 et appliquer les recommandations" macroéconomiques de Bruxelles, a souligné le commissaire européen chargé des Affaires économiques, Olli Rehn. Les progrès sur ce point "seront suivis de près et régulièrement", a prévenu l'Eurogroupe.
"Ce n'est que grâce à une action sur tous ces fronts que l'Espagne peut créer la stabilité financière et l'économie dynamique et compétitive capables de faire reculer le chômage de manière constante et durable", a insisté M. Rehn.
Madrid avait jusqu'ici tout fait pour ne pas obtenir une aide sur le modèle de ses voisins grecs ou portugais, de peur de se voir imposer des plans de rigueur drastiques et une surveillance de ses bailleurs de fonds.
La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde, a elle estimé que "la mise en oeuvre de ces mesures contribuerait à renforcer considérablement le système financier espagnol, ce qui sera une étape essentielle pour faire revenir la croissance et la prospérité dans le pays".
Afin de se conformer aux exigences de Bruxelles, le gouvernement du conservateur Mariano Rajoy vient d'imposer au pays de nouveaux sacrifices afin de récupérer 65 milliards d'euros. Ce qui a provoqué la colère de la rue.
Jeudi soir, une marée humaine a envahi le centre de Madrid, pour dire non au nouveau plan de rigueur qui impose de sévères coupes budgétaires.
La recapitalisation des banques risque d'être un fardeau supplémentaire pour la population espagnole. Le mémorandum insiste sur la nécessité de "minimiser le coût d'une restructuration des banques pour le contribuable", tout en souhaitant que les autorités locales imposent des mesures pour que les créanciers qui ne sont pas prioritaires et les actionnaires des banques acceptent de subir des pertes. Ce qui pourrait concerner un échantillon important de la population.
Après cet Eurogroupe téléphonique, les ministres devraient se retrouver prochainement, probablement début septembre, pour se pencher sur l'aide à la Grèce et une assistance à Chypre, qui a également demandé une aide financière.