Les ordinateurs ne vont pas disparaître du jour au lendemain mais la décision surprenante de Hewlett-Packard, premier fabricant au monde de PC, de se retirer du secteur est le signe le plus tangible à ce jour que l'ère post-PC est déjà entamée.
"Nous avons tendance à parler beaucoup de 'l'ère post-PC' mais il est évident qu'avec l'annonce d'HP, nous sommes plus près que jamais de cette réalité", a déclaré le spécialiste des technologies Carmi Levy.
"Quand un participant de l'âge d'or du matériel informatique délaisse le secteur sur lequel il s'est construit (...) on peut aisément conclure que le point de non retour a été officiellement atteint", a-t-il ajouté auprès de l'AFP.
HP a plus précisement annoncé qu'il avait "autorisé l'exploration de stratégies alternatives" dont une "séparation totale ou partielle" pour sa division d'ordinateurs.
Les PC sont désormais rattrapés par les puissants téléphones multifonctions, assimilables à des ordinateurs de poche, et des tablettes comme l'iPad d'Apple. Les consommateurs n'ont plus besoin d'un ordinateur, de bureau ou portable, pour être connectés.
Et alors que les marges de bénéfices sur les PC s'érodent peu à peu, HP n'a pas su capitaliser sur les nouveaux produits, estime l'analyste de Forrester Research, Sarah Rotman Epps.
L'ère post-PC "ne signifie pas que les PC vont disparaître mais que les ordinateurs sont délaissés au profit de l'informatique", a-t-elle souligné auprès de l'AFP.
Dans ce contexte, HP "n'a pas su trouver de réponse" pour remplacer le PC et se tourner vers des produits plus lucratifs, a-t-elle remarqué.
A l'inverse, "Apple a su innover" pour vendre l'iPad notamment en utilisant ses "magasins Apple", ses "services" et ses "logiciels" comme la boutique en ligne App Store ou la plateforme de musique iTunes.
HP a bien tenté de s'introduire sur de nouveaux marchés en achetant Palm, et son système d'exploitation webOS, en 2010. "Mais ils n'étaient pas prêts à mettre les pleins gaz et à investir le capital nécessaire pour en faire une activité lucrative", a souligné Sarah Rotman Epps.
Le géant de l'informatique a annoncé qu'il allait aussi arrêter de produire sa nouvelle tablette TouchPad, lancée début juillet, et les téléphones multifonctions utilisant webOS.
"L'effet tablette est réel et les ventes du TouchPad n'atteignent pas nos objectifs", a justifié le PDG de HP, Leo Apotheker.
Pour l'analyste de Gartner, Mark Margevicius, la décision de HP est surtout liée à une baisse des marges.
"Nous ne sommes pas dans une ère où le PC est mort. Le marché du PC est stable mais c'est encore un énorme secteur", a-t-il souligné.
Si les ordinateurs généraient "20% de marge", HP ne prendrait pas la décision d'abandonner cette activité.
HP suit les traces d'IBM qui en 2004 avait vendu sa division d'ordinateurs au chinois Lenovo afin de se concentrer sur les serveurs, les logiciels et les services aux entreprises.
"D'une certaine façon, ces deux opérations marquent la période de transition du 'hardware' (matériel) au 'sofware' (logiciel et services)", a remarqué Carmi Levi.
"Même s'il est encore possible de construire une activité rentable en vendant du harware, les retours, couplés à un potentiel de croissance limité, sont souvent insuffisants pour des investisseurs crispés", a-t-il ajouté.
"La décision de HP confirme, si on avait encore besoin d'être convaincu, que la boîte en elle-même ne suffit plus", a noté Carmi Levi. "C'est la valeur du logiciel qui fait fonctionner la boîte, et les services fournis grâce à ce logiciel, qui sont désormais plus importants, et plus rentables."