A l'issue de quatre jours de débat, l'Assemblée nationale a voté dans la nuit de jeudi à vendredi le budget rectificatif 2012, qui enterre des mesures emblématiques de Nicolas Sarkozy comme la TVA sociale et les heures supplémentaires exonérées et prévoit 7,2 milliards d'euros de hausses d'impôt.
Le détricotage de la TVA sociale et la fin des exonérations sociales et fiscales liées aux heures supplémentaires a monopolisé le débat pendant trois jours. Dans une ambiance parfois électrique, notamment en soirée, les anciens ministres UMP, comme Xavier Bertrand ou Eric Woerth, ont attaqué le gouvernement sur le thème du pouvoir d'achat.
Ce budget "restera comme une marque indélébile lorsqu'il s'agira de faire le bilan de François Hollande (...) Les seules décisions qui sont votées sont des décisions de destruction", a accusé lundi matin l'ancien Premier ministre François Fillon, sur Europe 1.
Juste avant le vote final à main levée vendredi le ministre délégué au Budget, Jérôme Cahuzac a dit regretter "la flibusterie parlementaire", qu'il affirme inhabituelle pour une loi de Finances.
L'UMP et le groupe centriste UDI ont voté contre.
Jeudi, les députés ont voté une contribution exceptionnelle sur la fortune, durci les droits de succession et doublé une taxe sur les banques, lors d'un débat plus calme et à un rythme accéléré.
Les contribuables possédant un patrimoine supérieur à 1,3 million d'euros et soumis de ce fait à l'ISF (Impôt de solidarité sur la fortune) acquitteront en effet cette année une contribution exceptionnelle. Celle-ci efface l'allègement de l'ISF décidé en juin 2011 par la précédente majorité de droite.
Cette contribution, qui doit rapporter 2,3 milliards d'euros au budget de l'Etat cette année, est instaurée dans l'attente d'une réforme plus globale de l'ISF dans le budget 2013.
Le ministre délégué au Budget, Jérôme Cahuzac, a parlé "d'un effort rude demandé à ceux qui le peuvent". La droite et le centre ont dénoncé un impôt "confiscatoire", qui sera selon eux sanctionné par le Conseil constitutionnel.
L'Assemblée a également approuvé une baisse, de 159.000 à 100.000 euros par enfant, de l'abattement sur les droits de succession, c'est-à-dire la partie d'un héritage ou d'une donation exonérée des droits de mutation payés par les bénéficiaires à l'Etat. Les exonérations en faveur des conjoints survivants seront conservées. L'abattement ne joue à plein que pour une succession ou donation tous les quinze ans (dix ans auparavant).
La plupart des orateurs de la droite, plus offensifs sur ce sujet que sur celui de la contribution exceptionnelle, ont reproché au gouvernement "d'empêcher les Français de transmettre le fruit des efforts de toute une vie".
"Nous voulons privilégier le mérite plutôt que l'héritage", a répliqué le socialiste Pierre-Alain Muet.
En fin de soirée, les députés ont supprimé la franchise de 30 euros imposée en 2011 aux étrangers sans papiers bénéficiaires de l'Aide médicale d'Etat (AME) sous les critiques de l'UMP.
"Il y a un moment où il faut un petit peu participer, qui ne peut pas payer 30 euros?", a lancé Thierry Mariani (UMP), assurant que "personne à l'UMP ne veut remettre en cause l'AME".
"Non l'AME ne fait pas un appel d'air! Quand on quitte son pays, ce n'est pas pour venir faire des cures thermales!", s'est emporté Catherine Lemorton (PS), présidente de la commission des Affaires sociales.
Gilbert Collard (Front National) a pour sa part défendu un amendement de suppression de l'AME, au nom de "la situation économique".
Un peu plus tôt, l'autre députée du FN, Marion Maréchal-Le Pen avait appelé de ses voeux le rétablissement d'une mesure d'un gouvernement de gauche, celui de Lionel Jospin, en l'occurrence la TIPP flottante, qui fait baisser la taxe sur les carburants quand le prix du brut augmente.
Les députés ont aussi débattu jeudi soir du contrôle de leur indemnité pour frais de mandat (IRFM) dont l'utilisation alimente la suspicion et les députés de la majorité ont renvoyé la balle dans le camp du président de l'Assemblée Claude Bartolone pour qu'il fasse des propositions.
Parmi les autres mesures votées jeudi: le doublement de la taxation sur les risques systémiques des établissements de crédit, le doublement du taux de la taxe sur les transactions financières, embryon du projet de taxation des transactions financières à l'échelle européenne, une taxe de 4% sur la valeur des stocks de produits pétroliers, ou encore la surtaxation des dividendes et la hausse du forfait social de 8 à 20% sur l'épargne salariale.
Le texte sera examiné au Sénat à partir de mardi et doit être adopté définitivement d'ici le 31 juillet.