L'Allemagne a relevé jeudi sa prévision de croissance pour cette année, confirmant qu'elle jouait presque cavalier seul dans une Europe qui peine à retrouver son niveau d'avant crise dans son ensemble.
Berlin table dorénavant sur un Produit intérieur brut (PIB) en hausse de 2,6% cette année. En janvier, il attendait 2,3%.
La première économie européenne continue à profiter de l'appétit mondial, en particulier des pays émergents, pour les machines, produits chimiques et voitures made in Germany.
Mais la contribution du commerce extérieur à la croissance est de moins en moins importante: après 1,3 point de pourcentage l'an dernier (sur une croissance de 3,6%), elle sera de 0,5 point cette année, et 0,3 point l'an prochain (sur 1,8%), selon les projections du gouvernement.
"C'est le cycle classique: l'export donne l'impulsion de départ, les investissements et la consommation prennent le relais", a expliqué le ministre de l'Economie Rainer Brüderle.
En effet, en Allemagne, les entreprises réinvestissent les profits tirés de l'export, tandis que la bonne tenue du marché du travail incite aussi les ménages, pourtant traditionnellement peu portés sur la dépense, à ouvrir plus grand leur porte-monnaie.
Tout cela "rend notre économie plus résistante", s'est félicité M. Brüderle. "Au vu de l'évolution des prix des matières premières, des catastrophes au Japon et de la crise de la dette pas encore surmontée en zone euro, cela va nous servir", a-t-il continué.
En 2009, la dépendance de l'Allemagne au commerce extérieur l'avait faite sombrer à pic dans la crise, subissant de plein fouet la chute de la demande mondiale. Avec une baisse du PIB de 4,7%, le pays avait été plus touché que la plupart de ses partenaires et voisins.
Aujourd'hui, on assiste à l'inverse. Londres a récemment abaissé sa prévision de croissance pour cette année à 1,7%, Rome n'attend plus que 1,1%, Madrid mise encore sur 1,3%, une prévision trop optimiste pour beaucoup. La France table sur 2% mais a recalibré mercredi à la baisse sa prévision pour l'année suivante (à 2,25%), citant un environnement international incertain.
D'autres pays de l'Union européenne, comme la Pologne ou la Suède, connaissent aussi des taux de croissance très confortables. Mais comme l'an dernier, l'Allemagne est bien partie pour faire figure de locomotive cette année au moins en zone euro.
"Même nos voisins et amis français se sont détendus et se réjouissent que nous les aidions avec notre croissance", a glissé M. Brüderle, qui n'a jamais pardonné à son homologue française Christine Lagarde ses commentaires l'an dernier sur les trop importants excédents du commerce extérieur allemand.
D'ici 2015, l'Allemagne mise sur une croissance annuelle moyenne de 1,75%, un chiffre que "beaucoup de pays seraient contents d'avoir", a fait remarquer M. Brüderle.
La bonne performance allemande ne sera sans doute pas sans incidence sur ses finances publiques. Le pays attend officiellement un déficit public de 2,5% cette année et 1,5% en 2011, mais sur la base des anciennes prévisions de croissance, moins optimistes. Le déficit allemand pourrait donc décroître encore plus rapidement que prévu.
En 2013, année électorale, "l'Allemagne pourrait avoir un budget à l'équilibre", prédit Holger Schmieding, économiste de la banque Berenberg.