Au nom de la solidarité et de la défense de la zone euro, la France se montre beaucoup plus disposée que l'Allemagne à apporter rapidement son aide financière à la Grèce.
Le chef de l'Etat Nicolas Sarkozy a réitéré lundi, de concert avec le président de la Commission européenne José Manuel Barroso, "la nécessité d'une action rapide et résolue contre la spéculation qui vise la Grèce afin d'assurer la stabilité de la zone euro".
Sans attendre le feu vert européen au déclenchement du plan d'aide, demandé vendredi par Athènes, le gouvernement français a d'ailleurs fait en sorte que tout soit prêt pour débloquer les fonds nécessaires.
Le budget 2010 a été modifié pour permettre à Paris de prêter cette année 3,9 milliards d'euros à la Grèce. Le Parlement devrait, sauf surprise, donner son aval la semaine prochaine à ce collectif budgétaire - à temps pour aider l'Etat grec à honorer sa prochaine échéance le 19 mai, lorsqu'il devra rembourser 8,5 milliards d'euros à ses créanciers.
"La négociation de l'accord international a déjà été longue et complexe, mon sentiment est que le Parlement votera sans modification le projet de loi", explique le rapporteur UMP du Budget au Sénat Philippe Marini.
De fait, l'opposition ne devrait pas faire obstacle au plan d'aide.
"C'est une affaire d'Etat: il y a eu un accord entre les Etats, il faut le mettre en oeuvre pour sauver la zone euro", affirme le président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, le socialiste Jérôme Cahuzac, qui recommandera à son parti de voter en faveur du texte.
"Il n'y a pas de temps à perdre, nous en avons déjà trop perdu, ce qui a amplifié la spéculation", renchérit François Hollande interrogé par l'AFP.
Alors que Berlin conditionne son aide à l'examen d'un nouveau plan de réduction du déficit grec, le député socialiste juge "critiquable" la position allemande. "Des conditions ont été posées, on ne va pas en ajouter d'autres", insiste-t-il.
Pour autant, Paris ménage son allié allemand et se garde de paraître trop conciliant vis-à-vis d'Athènes.
Semblant faire allusion au contexte préélectoral allemand, la ministre de l'Economie Christine Lagarde a souligné lundi que "les positions d'affichage et les débats" étaient "nécessaires pour les opinions locales".
"Il faudra être extrêmement attentif aux résultats", avait-elle prévenu ce week-end, promettant de ne décaisser les fonds qu'au fur et à mesure des besoins et de mettre "le pied sur la pédale du frein" en cas de "défaut de paiement" de la Grèce.
Au-delà du plan d'aide, la crise grecque soulève des questions sur le fonctionnement de la zone euro.
Nicolas Sarkozy a rappelé lundi "l'importance d'une stratégie économique européenne ambitieuse basée sur un véritable gouvernement économique européen".
"Derrière cette crise, c'est toute l'architecture d'une zone monétaire qui est en question", analyse-t-on de source gouvernementale. "Cela fait ressortir toutes les questions éludées lors de la création de la monnaie unique."
Selon cette source, la possibilité d'exclure de la zone euro un pays qui ne respecte pas ses engagements, caressée en Allemagne, "n'est pas la solution que privilégie la France".
Néanmoins, quelques voix, isolées, commencent à l'évoquer. "La Grèce sortira de l'euro tôt ou tard! Le plus tôt sera le mieux pour tout le monde", lançait ainsi, la semaine dernière, le député UMP Jacques Myard.
Pour Philippe Marini, "si le plan d'aide ne fait pas cesser les attaques contre la Grèce", "il faudra s'interroger sur les conditions d'une sortie temporaire de la zone euro pour les Etats qui manifestement ne peuvent pas converger assez vite avec les autres".