La prime que va instaurer le gouvernement pour associer les salariés au partage de la richesse dans les entreprises pourrait être perçue par quatre millions d'entre eux, a-t-on appris mardi auprès du ministère du Travail, qui a évoqué "un ordre de grandeur".
8,9 millions de salariés sont employés dans des entreprises de plus de 50 salariés, tandis que les entreprises qui versent des dividendes emploient six millions de personnes, selon la même source.
"Deux tiers" de ces six millions, soit environ quatre millions, devraient être concernés par le versement de cette prime, qui sera obligatoire dans les entreprises employant plus de 50 salariés et dont le dividende a progressé l'année n par rapport à la moyenne des deux années précédentes, estime le ministère du Travail, au vu d'"une étude d'impact".
Le montant (et les modalités) de cette prime sera négocié au sein des entreprises et exonéré de cotisations sociales, hormis la CSG-CRDS et le forfait social, jusqu'à un plafond de 1.200 euros.
Le ministère avait estimé fin avril qu'environ huit millions de salariés étaient concernés par ces négociations.
Par ailleurs, le versement de la prime devra "intervenir dans les trois mois suivant la publication de la loi" au Journal officiel et, pour les années suivantes, "dans les trois mois suivant la tenue d'Assemblée générale des actionnaires" fixant le montant du dividende versé par action.
Le gouvernement vise "une adoption définitive avant l'été" par le parlement, avec une première lecture à l'Assemblée nationale "dans la semaine du 14 juin". Le texte devait partir mardi soir au Conseil d'Etat.
Cette prime aura "un caractère collectif" devant s'appliquer à tous les salariés de l'entreprise, a précisé le ministère. Elle pourra être "différenciée", comme pour la participation et l'intéressement, en fonction du salaire et de la durée de présence dans l'entreprise.
Elle devra être négociée avec les délégués syndicaux ou le comité d'entreprise. Faute d'accord, l'employeur arrêtera le dispositif "après avis du CE ou des délégués du personnel". A défaut de telles instances, les décisions de l'employeur devront être ratifiées par deux tiers du personnel, consulté par référendum.
D'autre part, la prime ne pourra se substituer à des éléments de rémunération prévus par la loi ou par convention.
L'employeur pourra verser un autre avantage qu'une prime (intéressement ou participation supplémentaires, actions gratuites...) à condition que le personnel (ou ses représentants) soit d'accord.
Pour les groupes, ce sera le dividende versé par la maison-mère qui constituera la référence. Ce qui signifie que les salariés d'une filiale d'un groupe assujetti à la loi mais qui compterait moins de 50 salariés toucheront eux aussi la prime.
Dans les unités de moins de 50 salariés, le principe est que le versement d'une prime est facultatif.
S'agissant des filiales en France de groupes étrangers, le critère sera la progression ou non du dividende dans "la plus haute maison-mère située sur les territoire français".
Les entreprises qui se déroberaient à leur obligation encourent "une sanction identique" à celle prévue pour absence de négociation annuelle obligatoire sur les salaires (quelques milliers d'euros).
Pour les finances publiques, "le coût principal" viendra de la déductibilité (de l'impôt sur les sociétés) du montant des primes versées. Le ministère affirme qu'il n'y a pas de manque à gagner pour la sécurité sociale, car cette prime ne serait pas versée en l'absence d'obligation légale, et qu'au contraire, le forfait social acquitté ira dans les caisses de la sécurité sociale.