Vivement critiqué par le passé pour ses délocalisations, le groupe automobile Renault va fabriquer la nouvelle version de son utilitaire Trafic, actuellement produit en Espagne et en Grande-Bretagne, dans l'usine normande de Sandouville aux effectifs en déclin.
La construction d'un utilitaire avait été promise à l'automne 2008, lors d'une visite du Président Nicolas Sarkozy sur le site français, alors ébranlé par un plan de suppression d'emplois, sans toutefois qu'un nom soit révélé.
Samedi, le ministre de l'industrie Christian Estrosi a levé le voile en confirmant à l'AFP que ce sera "la nouvelle version du (fourgon) Trafic", dont 47.321 exemplaires avaient été produits par la marque au losange l'an passé dans l'usine espagnole du japonais Nissan à Barcelone, et dans celle de l'allemand Opel à Luton au Royaume-Uni.
"C'est un engagement que j'ai obtenu de Renault et de sa direction générale, notamment de M. Pelata (directeur général délégué, ndlr). Je peux vous dire que l'assemblage du nouveau modèle commencera dès 2012", a ajouté le ministre.
La commercialisation de la nouvelle version de Trafic est prévue à partir de 2013.
Contacté par l'AFP, le constructeur, détenu à 15% par l'Etat --son actionnaire principal--, n'a pas démenti cette information. Invoquant des questions de confidentialité, Renault a simplement répété qu'il allait aménager son usine de Sandouville à partir de l'été prochain pour produire un véhicule utilitaire, dont l'assemblage devrait commencer en 2012 et la commercialisation un an plus tard.
L'objectif est de "stabiliser l'emploi" dans cette usine de Sandouville, qui compte actuellement 2.397 salariés et fabrique notamment la Renault Espace et la Laguna, a dit M. Estrosi. Elle a assemblé 63.301 véhicules en 2009, un chiffre en baisse par rapport aux années précédentes.
Ouverte en 1964 pour construire la R-16, l'usine Renault de Sandouville a perdu 1.300 emplois fin 2008 début 2009, dans le cadre d'un vaste plan de départs volontaires.
L'arrivée du Trafic à Sandouville ne dissipe pas les craintes des syndicats, qui redoutent une poursuite des suppressions d'emploi. Car "les remplaçantes de la Laguna et de l'Espace ne seront vraisemblablement pas faites à Sandouville", fait remarquer Nicolas Guermonprez, secrétaire général de la CGT à Renault Sandouville.
D'après M. Estrosi, Renault est en discussion avec Opel, filiale du groupe automobile américain General Motors, et Nissan, dont il détient 44,3%, pour les convaincre de transférer eux aussi à Sandouville la production de leurs utilitaires respectifs Vivaro et Primastar, actuellement assemblés dans les mêmes sites que le Trafic.
"Mais rien n'est décidé à ce stade", a toutefois relevé le ministre.
En cas d'accord, la production totale de véhicules utilitaires atteindrait 150.000 volumes par an à Sandouville, soit la capacité maximale de l'usine.
Renault produit deux modèles utilitaires en France: le Kangoo et le Master.
Les relations entre Renault et l'Etat français s'étaient quelque peu grippées en début d'année.
Soupçonné de vouloir délocaliser l'ensemble de la production de la future voiture particulière Clio 4 en Turquie, le PDG de Renault Carlos Ghosn avait été convoqué en urgence le 16 janvier à l'Elysée. Il avait alors promis de continuer à réaliser en France dans son usine de Flins (Yvelines) autant de Clio qu'il en vendait dans l'Hexagone.
Au plus fort de la crise de 2008/2009, Renault comme son rival français PSA Peugeot Citroën ont bénéficié de prêts à taux préférentiels de l'Etat de 6 milliards d'euros, en échange d'engagement des constructeurs sur l'emploi.