DJAKARTA/PARIS (Reuters) - L'Indonésie a prié des ambassades d'envoyer des représentants à la prison de très haute sécurité où doivent être exécutés dix condamnés à mort, dont le Français Serge Atlaoui, ont déclaré vendredi des diplomates.
La notification officielle habituellement transmise 72 heures avant une exécution n'a toujours pas été reçue par les ambassades, ont-ils cependant ajouté.
"Notre ambassade en Indonésie n'a eu aucune notification sur une prochaine exécution de Serge Atlaoui", a confirmé sur Twitter le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Romain Nadal.
Outre Serge Atlaoui, originaire de Metz, en Moselle, deux ressortissants australiens, un Brésilien, un Nigérian et une Philippine également condamnés pour trafic de drogues attendent dans le "couloir de la mort".
"Je suis inquiet", a déclaré vendredi matin sur France Info le porte-parole du gouvernement français, Stéphane Le Foll. "Les appels du président de la République, la lettre qu'a envoyée le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, la pression diplomatique qui est exercée par la France ne semblent pas faire changer le gouvernement indonésien", a-t-il ajouté.
Le gouvernement français, a-t-il assuré, continuera tout ce qui est en son pouvoir pour tenter d'éviter l'exécution de Serge Atlaoui, enfermé dans l'île prison de Nusa Kambangan.
"On nous a demandé d'être là samedi", a déclaré à Djakarta un diplomate sous le sceau de l'anonymat. "Nous ne savons pas quelle sera la date de l'exécution mais nous nous attendons à ce que cela soit dans les jours à venir."
Un porte-parole de la police a dit que l'ordre de préparer le peloton d'exécution n'avait pas encore été transmis par les autorités.
PROCÈS BCLÉ
Serge Atlaoui, 51 ans, qui a passé dix années en prison en Indonésie pour "trafic de stupéfiants", clame son innocence.
"Serge n'est pas un baron de la drogue, Serge n'est pas un trafiquant de drogue. C'est juste un artisan soudeur qui est parti là-bas pour installer des machines, tout en étant naïf", a déclaré sur iTELE son frère André.
"Il a reconnu ses erreurs auprès de l'Etat indonésien et il faut absolument que Serge ait droit à un procès équitable", a ajouté ce dernier, qui juge notamment son frère victime d'un procès bâclé.
Serge Atlaoui, père de quatre enfants, était venu en Indonésie en 2005 pour un chantier, alors qu'il enchaînait les contrats, notamment à l'étranger, pour tenter de sortir d'une situation financière difficile, a expliqué dans la presse son avocat, Richard Sédillot.
L'usine où il travaillait cachait un laboratoire d'ecstasy. Selon son épouse, Sabine, il s'est vite rendu compte que quelque chose "clochait" mais il n'a pu rentrer en France faute d'argent pour acheter un billet d'avion. La police indonésienne l'a arrêté lors d'un raid dans l'usine.
La Cour suprême d'Indonésie a rejeté mardi son dernier recours, ainsi que ceux des autres ressortissants étrangers condamnés à mort. Les autorités de Djakarta ont ignoré tous les appels à la grâce de dirigeants étrangers.
La France a prévenu que les exécutions risquaient de mettre en péril ses relations avec l'Indonésie. L'Australie a sollicité à plusieurs reprises la clémence de la justice à l'égard de ses deux ressortissants, Andrew Chan et Myuran Sukumaran.
Selon un avocat des deux Australiens, une lettre d'instructions a été adressée par les autorités judiciaires aux responsables chargés d'organiser les exécutions.
"Ces éléments sont très préoccupants", a dit Michael O'Connell, basé à Melbourne. "De fait, cette lettre d'instructions est un pas de plus en direction de l'exécution des dix personnes dans un futur proche."
(Randy Fab et Emmanuel Jarry, Nicolas Delame pour le service français, édité par Jean-Stéphane Brosse)