Le gouvernement a chargé une commission d'établir d'ici janvier des scénarios pour l'énergie en France d'ici 2050, a annoncé mardi le ministre de l'Energie Eric Besson, incluant une "sortie progressive" du nucléaire, une option qu'il combat pourtant fermement.
Parmi les scénarios à "explorer" pour les experts, ONG, professionnels et pouvoirs publics, figurent la prolongation de la durée de vie du parc nucléaire actuel, l'accélération de la modernisation du parc nucléaire, ainsi que la possibilité d'"aller vers une sortie progressive du nucléaire à horizon 2050 voire 2040, ou vers une réduction progressive de la part du nucléaire", a expliqué le ministre à l'AFP.
Actuellement, la part du nucléaire dans la production d'électricité de la France est d'environ 75%, de très loin la plus élevée des grandes puissances, et le gouvernement de François Fillon a répété ces derniers mois qu'il assumait le choix de l'atome malgré la catastrophe de Fukushima au Japon.
Mais le gouvernement a également lancé un vaste plan de développement du renouvelable, notamment par l'éolien en mer, visant à atteindre 23% de la production totale d'ici 2020 et à diversifier les ressources de l'Hexagone.
"L'objectif est d'explorer plusieurs scénarios possibles du devenir du système énergétique français aux horizons 2030-2050, d'en préciser les limites et d'en établir les conséquences, avantages et inconvénients", a souligné M. Besson.
La réflexion française intervient alors que plusieurs pays européens, en premier lieu l'Allemagne mais également la Suisse et l'Italie, ont tourné le dos à l'énergie nucléaire après Fukushima, remettant en question "la renaissance" de l'atome espérée par l'industrie nucléaire française et mondiale 25 ans après Tchernobyl.
Présentée par M. Besson comme "naturellement pluraliste", la commission, qui devra remettre un rapport "dans le courant du mois de janvier", s'incrit dans le cadre de l'"exercice de prospective" intitulé "Energies 2050" que le gouvernement avait lancé en juillet.
A l'époque, M. Besson avait préconisé un ratio d'environ 2/3 de nucléaire d'ici 20 à 30 ans, en parallèle à la montée en puissance du renouvelable.
Présidée par Jacques Percebois, professeur d'université spécialiste de l'énergie, la commission aura pour vice-président Claude Mandil, directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie (AIE).
Selon un projet de composition, elle regroupera également six autres experts: le professeur Christian de Perthuis, l'économiste Christian de Boissieu, l'ancien PDG d'EDF Pierre Gadonneix, la directrice énergie de CapGemini Colette Lewiner, l'ingénieur Jean-Marc Jancovici et l'économiste spécialiste des matières premières Jean-Marie Chevalier.
Viendront s'ajouter des ONG (Greenpeace, WWF, Réseau Action Climat, UFC Que choisir...), syndicats (CFDT, CFE/CGC, CFTC, CGT, FO), des fédérations professionnelles (Union française de l'industrie pétrolière, Syndicat des énergies renouvelables, Union française de l'électricité...) et des représentants de l'Etat et des agences publiques.
La commission s'appuiera sur une équipe de rapporteurs qui viennent du Centre d'Analyse Stratégique, de la Direction générale de l'Energie et du Climat, de la Direction générale du Trésor et de l'IFP-EN, selon Bercy.
Le rapport devra prendre en compte la sécurité et la compétitivité de l'approvisionnement en énergie de la France, ainsi que la protection de l'environnement, la lutte contre le réchauffement climatique et "l'acceptabilité sociétale" des différents scénarios, selon M. Besson.
"Les travaux seront complémentaires", avec une autre commission mise en place en juin par la ministre de l'Ecologie Nathalie Kosciusko-Morizet pour réfléchir à la baisse des émissions de CO2 en France d'ici 2030-2050, a assuré le ministre.