Dans la file d'attente du bureau d'une célèbre agence de transfert d'argent à La Havane, des Cubains viennent récupérer les deniers envoyés par leurs proches résidant aux Etats-Unis. D'une seule voix, ils saluent l'allègement des restrictions américaines, effectif ce vendredi.
"Cette décision du président (américain Barack) Obama est très positive. Cela va bénéficier à nos deux peuples", se réjouit le retraité Julio Montalvi au sujet de ces nouvelles mesures qui relèvent notamment le plafond des "remesas" ("envois d'argent") de 500 à 2.000 dollars par trimestre.
"Cela va me permettre d'améliorer mon quotidien", confirme à l'AFP Pedro Rodriguez Medel, un danseur de 25 ans qui patiente aussi devant le bureau de la Western Union. Seule entreprise financière habilitée pour gérer les envois d'argents par des Américains à leur famille à Cuba, la "WU" compte plus de 220 guichets à travers le pays.
Si les personnes interrogées devant cette succursale de la vieille Havane restent très secrètes sur la quantité d'argent reçu et son usage, elle reconnaissent volontiers que cette manne est vitale dans un pays ou le salaire moyen est de 20 dollars par mois.
"Nous avons passé de nombreuses années à attendre et il ne peut plus rien arriver de mauvais. Le pire est derrière nous et maintenant on s'attend à ce que tout s'améliore", s'enthousiasme dans la file d'attente une femme sous couvert de l'anonymat.
- Les "remesas", 2e source de devises de Cuba -
Evaluées à 2,7 milliards de dollars annuels, les "remesas" constituent la deuxième source de devises de l'île, après la vente de services professionnels, principalement médicaux.
Noelia Fuentes Montero, 64 ans, reconnaît "recevoir parfois des envois d'argent". "Tout ce qui a été fait à Cuba à partir de la Révolution est bénéfique (...) La décision (du dégel avec les Etats-Unis) a été prise par nos dirigeants et le peuple la soutient, je la soutiens", clame à l'AFP cette fonctionnaire du ministère du Commerce extérieur sans s'étendre davantage.
L'assouplissement de certaines restrictions vient concrétiser le rapprochement historique entre les deux pays annoncé à la mi-décembre, même si l'embargo économique décrété en 1962 contre Cuba demeure en place et devra être levé par le Congrès des Etats-Unis, très réticent.
A partir de ce vendredi, les voyages sur l'île communiste ainsi que les échanges dans des domaines clés tels que les télécommunications sont étendus par Washington.
Des mesures qui vont profiter aux Cubains, mais aussi aux visiteurs venus des Etats-Unis, qui pourront désormais utiliser leurs cartes de crédit sur l'île communiste.
En outre, ceux-ci pourront revenir avec des biens pour une valeur de 400 dollars, soit 300 dollars de plus qu'auparavant, même s'ils ne peuvent rapporter que pour 100 dollars de cigares ou d'alcool.
"Tout ce qui rapproche nos deux pays est merveilleux, j'espère que nous allons devenir bons amis, parce que nous sommes voisins, comme avec le Canada", commente Salomon Schepps, un avocat de New York rencontré dans la vieille ville.
"Quand j'ai entendu la nouvelle, ce fut grandiose. Je veux rapporter des havanes si je peux, et peut-être un peu de rhum !", se réjouit son fils Danny, un étudiant de 22 ans.