L'économie grecque, à peine sortie de la plus longue dépression de son histoire, est de nouveau aux prises avec la récession sur fond d'incertitudes politiques, rendant d'autant plus urgente la conclusion d'un accord entre le gouvernement de gauche et les créanciers du pays.
En repli de 0,2% au premier trimestre, par rapport au dernier trimestre 2014, le PIB est en baisse pour le second trimestre consécutif après avoir affiché une contraction de 0,4% sur les trois derniers mois de l'année 2014.
La rechute de la fin d'année 2014 était attribuée à l'inquiétude qui s'était emparée de certains secteurs d'activité à l'approche de la période électorale entamée en décembre.
La mauvaise performance de début 2015 est mise sur le compte de l'incertitude liée à l'issue des négociations laborieuses entre la Grèce et ses créanciers sur les réformes et mesures budgétaires attendues d'Athènes en échange de la poursuite du financement à court terme du pays.
Cette incertitude a déjà eu pour effet de faire partir 26,8 milliards d'euros de dépôts privés des banques grecques de décembre à mars, pour atteindre 138,5 milliards d'euros, et encore, selon des chiffres officieux publiés par Bloomberg, 7 milliards d'euros en avril.
"Tant que ces négociations grecques n'aboutissent pas à quelque chose de concret, l'investissement restera faible et les consommateurs reporteront leurs dépenses. L'économie grecque continuera à souffrir", selon Jameel Ahmad, analyste chez FXTM.
Malgré quelques progrès enregistrés ces dernières semaines dans les discussions, l'impact des tractations prolongées est déjà là, a estimé la Commission européenne qui a revu à la baisse, la semaine dernière, ses prévisions pour la Grèce.
La croissance, selon la Commission, devrait s'élever à seulement 0,5% cette année, en net recul par rapport aux dernières prévisions de février, qui tablait sur un PIB en hausse de 2,5%. Cette prévision se base sur une issue heureuse des négociations et un accord d'ici juin avec les créanciers.
Le budget 2015 établi par la précédent gouvernement grec de coalition droite-socialiste était fondé sur une prévision de croissance de 2,9%.
Mais le gouvernement grec, dirigé depuis fin janvier par la gauche radicale du Premier ministre Alexis Tsipras, a révisé ces calculs. Différents documents de travail attribués au gouvernement grec et parus dans la presse ces derniers jours faisaient état de prévisions de PIB annuel allant de 0,1 à 0,8%.
"Les consommateurs sont fatigués de toutes ces incertitudes et reportent leurs achats, ce qui affaiblit l'économie", décrit Manos Chadzidakis, analyste chez Beta Securities.
Ainsi, le chiffre d'affaires des soldes intersaisons de début mai a baissé de 11 à 20% par rapport aux soldes d'hiver, selon le bilan de la confédération du commerce ESEE.
L'activité PMI du secteur de l'industrie manufacturière, à 46,5 en avril, est pour le huitième mois consécutif sous la barre des 50 points qui délimite les périodes d'expansion et de récession, relèvent les économistes de Eurobank dans une note.
Toutefois, observent-ils aussi, la dégradation de premier trimestre est moins forte qu'attendu et la prévision d'une nouvelle saison record pour le tourisme grec devrait sauver la croissance annuelle de 2015, si un accord est trouvé avec les créanciers.
"Nous sommes au début de l'année et le change euro-dollar favorable à la Grèce, combiné à la faiblesse des prix du pétrole et à l'activité touristique peuvent nous permettre de rattraper ce mauvais départ", estime également Manos Chadzidakis.
Tous les indicateurs ne sont d'ailleurs pas décourageants: entre février et mars, la production manufacturière, en berne durant toute la crise, a progressé de 1,2%. Et sur un an, la valeur des exportations grecques (hors produits pétroliers) est en hausse de 20% en mars, le nombre de permis de construire a augmenté de 10% en février et celui des immatriculations est en hausse de 47% en avril.
La Grèce a perdu un quart de son PIB au cours de six années d'une récession profonde qui s'était enracinée depuis la fin 2008. L'économie a commencé à redresser la tête début 2014 et le pays a alors inscrit trois trimestres de croissance consécutifs.