Le gouvernement ukrainien a posé jeudi un ultimatum à la Russie en menaçant de porter leur différend concernant la dette ukrainienne devant les tribunaux si Moscou n'accepte pas une restructuration de son crédit de trois milliards de dollars d'ici au 29 octobre.
Ce bras de fer risque de placer l'Ukraine en défaut de paiement partiel, voire de faire dérailler le plan d'aide financière internationale, alors même qu'elle vient d'obtenir dans la douleur le feu vert de la majorité de ses créanciers privés pour restructurer sa dette.
"Nous proposons à la Russie de décider (d'ici) au 29 octobre: veulent-ils les mêmes conditions que les autres créanciers ou se considèrent-ils uniques? S'ils se considèrent uniques, nous sommes prêts à les affronter devant les tribunaux", a déclaré le Premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk au cours d'un point de presse.
L'Ukraine, sous perfusion financière de ses alliés occidentaux, doit rembourser en décembre cette aide accordée par le Kremlin il y a deux ans au régime prorusse de Viktor Ianoukovitch peu avant sa destitution suite à trois mois de la contestation pro-européenne réprimée dans le sang.
Mais le gouvernement pro-occidental de Kiev qui considère ce prêt comme commercial refuse de le faire si Moscou n'accepte pas une décote de 20% comme les autres créanciers privés, au risque de se trouver en défaut sur cette dette.
Selon M. Iatseniouk, "75% des créanciers" privés ont accepté de restructurer la dette lors d'une réunion mercredi à Londres, représentant l'annulation de 3 milliards de dollars de dette et une restructuration de 8,5 milliards de dollars.
La ministre ukrainienne des Finances Natalie Jaresko qui avait négocié pendant plusieurs mois cet accord difficile, a précisé jeudi que, pour qu'il soit effectif, l'Ukraine allait émettre à la mi-novembre de nouvelles obligations pour remplacer celles existantes.
"Le seul pays qui n'a pris part au vote est un pays intéressant qui s'appelle la Russie", a dénoncé le Premier ministre.
L'issue de cette querelle est cruciale et pourrait, en théorie, faire dérailler le plan d'aide de 17,5 milliards de dollars que le FMI a accordé en mars à l'Ukraine, confrontée à une crise économique aggravée par un conflit armé dans l'Est séparatiste prorusse.
Si le FMI considère cette dette comme venant du secteur public, il serait dans l'impossibilité légale de continuer à apporter son assistance à Kiev. En revanche, si elle est jugée comme étant privée, l'institution pourra continuer son plan d'aide.
Le ministre russe des Finances Anton Silouanov a rappelé cette semaine que ce prêt avait été octroyé "par le gouvernement (russe) à un autre gouvernement et ne peut pas être considérée comme commercial".
Lors d'une rencontre la semaine dernière à Lima, M. Silouanov et Mme Jaresko n'avaient pas réussi à s'accorder sur le statut de ces trois milliards.
Le président russe Vladimir Poutine a appelé mardi le Fonds monétaire (FMI) à prêter trois milliards de dollars supplémentaires à l'Ukraine pour qu'elle puisse rembourser sa dette envers la Russie.