PARIS (Reuters) - Les syndicats français réfléchissent à une action commune pour obtenir une refonte en profondeur, voire le retrait, du projet de réforme gouvernemental du droit du travail.
Le texte que doit présenter Myriam El Khomri lors du conseil des ministres du 9 mars prévoit, dans sa version actuelle, d'assouplir le Code du travail en élargissant le champ de la négociation collective.
Syndicats, de Force ouvrière à la CFTC, parlementaires de gauche, de même que le premier secrétaire du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis, ont fait part de leur scepticisme et pour certains de leur irritation devant ce projet.
"Cet avant-projet est très déséquilibré entre la flexibilité et la sécurité. Il apporte de mauvaises réponses à des revendications patronales, en faisant la part trop belle à une vision un peu dogmatique de la flexibilité", dénonce le secrétaire général de la CFDT dans un entretien publié vendredi dans le Monde.
"L’accueil de la CFDT est négatif", insiste Laurent Berger, qui réfléchit à une riposte.
"La CFDT se donnera les moyens de faire évoluer ce texte et on verra avec d’autres organisations syndicales si on peut s’exprimer et agir en commun", ajoute-t-il, tout en disant son attachement au principe de la négociation contenu dans le texte.
Réaffirmant son hostilité à un projet qui prépare selon elle "un recul historique des droits pour les salariés", la CGT évoque elle aussi une possible contre-offensive.
"Il y a besoin d’une réaction forte et unitaire du monde du travail, salariés, précaires, privés d’emplois", peut-on lire dans un communiqué de l'organisation. "La CGT s'engage à travailler à cela de manière urgente."
"CAMPAGNE DANS LES UNIVERSITÉS"
Le syndicat étudiant Unef, à la pointe du mouvement contre le Contrat première embauche (CPE) en 2006, a quant à lui dressé un parallèle avec ce projet finalement abandonné par le gouvernement de Dominique de Villepin.
"L’Unef propose (...) aux jeunes de fêter les 10 ans du CPE à leur façon. Le syndicat étudiant lancera dès la semaine prochaine une campagne dans les universités contre la loi El Khomri", est-il écrit dans un communiqué de l'organisation.
"Et (l'Unef) appelle les jeunes à manifester à l’occasion de la prochaine journée de mobilisation qui sera fixée par l’intersyndicale", peut-on également lire.
Jeudi, Joseph Thouvenel vice-président de la CFTC, avait jugé le projet "très dangereux" pour les salariés et Franck Mikula, secrétaire national de la CFE-CGC, s'était dit "très en colère".
La mouture actuelle confirme la durée légale de 35 heures de travail par semaine, mais presque tout le reste est ouvert à la négociation, y compris la rémunération des heures supplémentaires, voire laissé à la discrétion de l'employeur dans certains cas, en l'absence d'accord.
Elle assouplit aussi l'établissement de forfaits annuels individuels en jours ou en heures et étend cette possibilité aux entreprises de moins de 50 salariés, non couvertes par un accord collectif, dans la limite de 235 jours travaillés.
"Le renvoi à la négociation sociale n’est en aucun cas un recul des droits des salariés", a déclaré Myriam El Khomri dans une interview parue jeudi dans les Echos.
(Simon Carraud, édité par Sophie Louet)